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Daloa, plaque tournante ivoirienne pour les migrants qui rêvent de l''Europe


Une scène de vie quotidienne à Daloa, Côte d’Ivoire, septembre 2017. (VOA/ Georges Ibrahim Tounkara)
Une scène de vie quotidienne à Daloa, Côte d’Ivoire, septembre 2017. (VOA/ Georges Ibrahim Tounkara)

Daloa, troisième grande ville en Côte d'Ivoire, dans le centre ouest, fait énormément parler d'elle en matière d'immigration clandestine. Elle est quasiment devenue la plaque tournante pour les départs vers l'Europe.

Daloa, à 384 kilomètres d'Abidjan, est la capitale du Centre Ouest du pays. Grande région productrice de café et de cacao, la ville de près de 300.000 habitants, tire cependant sa célébrité depuis quelques années de la place qu'elle occupe dans le trafic de jeunes en partance pour l'Europe.

Une vidéo est protégée sur un écran lors d’une séance de sensibilisation sur le danger de l'immigration clandestine à Daloa, Côte d’Ivoire, septembre 2017. (VOA/ Georges Ibrahim Tounkara)
Une vidéo est protégée sur un écran lors d’une séance de sensibilisation sur le danger de l'immigration clandestine à Daloa, Côte d’Ivoire, septembre 2017. (VOA/ Georges Ibrahim Tounkara)

Sur place, une ONG internationale, le Réseau des Africains de l'Allemagne, est en meeting de sensibilisation devant plus de 500 personnes réunies au stade d’Orly 2, l'un des quartiers de la ville.

Sa présidente Sylvie Nantcha tente de convaincre l'assistance essentiellement composée de jeunes, sur les dangers de l'immigration irrégulière.

"Le désert, c'est le plus grand cimetière. Quand je quittais récemment Agadez au Niger, on m'a dit que 50 corps de migrants venaient d'être découverts. 57 autres personnes étaient retrouvées vivantes et devaient être ramenées vers Agadez. En plus, il y a la situation en Libye où les migrants sont kidnappés et libérés après paiement d'une rançon," explique Mme Nantcha.

A Daloa, de nombreuses familles surtout au sein de la communauté Malinke, mettent tout en œuvre pour faciliter le départ de leurs fils ou filles vers l'Europe.

Les femmes n'hésitent pas à vendre or, bijoux et autres objets de valeurs pour assurer le voyage à leurs enfants.

C'est pour elles une question d'honneur.

Le désert, c'est le plus grand cimetière. Quand je quittais récemment Agadez au Niger, on m'a dit que 50 corps de migrants venaient d'être découverts. 57 autres personnes étaient retrouvées vivantes et devaient être ramenées vers Agadez. En plus, il y a la situation en Libye où les migrants sont kidnappés et libérés après paiement d'une rançon,"
explique Mme Nantcha.

A Daloa, une famille sur deux a au moins un parent en Europe.

Pourquoi Daloa est-elle devenue en quelques années la plaque tournante de ces départs vers l'Europe?

"Tous les quartiers de Daloa sont atteints par ce phénomène. Les jeunes sont poussés par leurs parents. Tout le monde veut voir son enfant partir. Il y a aussi des maisons de recrutement ici," se plaint Touré Lanciné, un ancien député et chef des communautés Malinke de Daloa.

Pour Touré Lancine, il faut s'attaquer à la lancinante question de l'emploi des jeunes si l'on veut freiner l'hémorragie que constitue l'immigration clandestine.

" A Daloa il n’y a pas les possibilités que l'on pourrait trouver ailleurs dans le pays. Il n'y a pas d'emplois, pas d'usines. Le chômage est chronique ici. L'Europe doit nous aider à travers les ONG à freiner ces départs, à maintenir ces jeunes sur places, " soutient l’ancien député.

Fort des déboires de l'un de leur frère bloqué depuis quelques mois en Libye, Kone Salif et son frère Aboubacar disent avoir renoncé à tout projet de départ vers l'Europe.

Des jeunes lors d’une séance de sensibilisation sur le danger de l'immigration clandestine à Daloa, Côte d’Ivoire, septembre 2017. (VOA/ Georges Ibrahim Tounkara)
Des jeunes lors d’une séance de sensibilisation sur le danger de l'immigration clandestine à Daloa, Côte d’Ivoire, septembre 2017. (VOA/ Georges Ibrahim Tounkara)

"Nous, sincèrement, nous voulons rester ici sur place et nous débrouiller. Nous avons un petit frère qui était en Libye. Nous savons ce qu'il a enduré là-bas. Il nous appelait sans cesse pour qu'on lui envoie de l'aide afin qu'il parte de ce pays. Nous avons dû vendre quelques bœufs pour cela. Mais ici les jeunes partent parce qu'il n'y a pas de boulot. Quand on n’a pas de moyens et qu'on doit venir en aide à sa famille, c'est vraiment dur," explique les deux frères Salif.

Traore Youssouf témoigne, pour sa part, avoir vécu toutes sortes de difficultés en Libye. De retour à Daloa, il n'a cependant pas renoncé à son projet de se rendre coûte que coûte en Europe.

Des jeunes posent pour une photo à l’issue d’une séance de sensibilisation sur le danger de l'immigration clandestine à Daloa, Côte d’Ivoire, septembre 2017. (VOA/ Georges Ibrahim Tounkara)
Des jeunes posent pour une photo à l’issue d’une séance de sensibilisation sur le danger de l'immigration clandestine à Daloa, Côte d’Ivoire, septembre 2017. (VOA/ Georges Ibrahim Tounkara)

"J'étais avec des amis en Libye. Certains ont pu passer en France, d'autres en Allemagne. Mais moi, faute de moyens financiers, je suis resté bloqué là-bas. J'ai 30 ans et je suis père de deux enfants. Je ne peux pas rester ici à Daloa à ne rien faire," défie le jeune Youssouf.

En français ou dans les langues locales, tous les canaux sont aujourd'hui propices dans la sensibilisation contre le fléau que constitue l'immigration clandestine.

Reportage de Georges Ibrahim Tounkara à Daloa, Côte d'Ivoire, pour VOA Afrique

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