Après des mois d'incertitude, la Corée du Nord a décidé la semaine dernière, lors du premier dialogue officiel intercoréen en plus de deux ans, d'envoyer aux jeux de Pyeongchang (9-25 février) une délégation comptant non seulement des athlètes, mais aussi des pom-pom girls ou encore des artistes.
Quatre délégués du Nord et autant du Sud se sont retrouvés lundi peu après 10H00 (01H00 GMT) dans la partie nord de la "zone commune de sécurité" (JSA) du village frontalier de Panmunjom, a annoncé le ministère sud-coréen de l'Unification.
Parmi la délégation nord-coréenne figurent Kwon Hyok-Bong, un haut responsable du ministère nord-coréen de la Culture, et Hyon Song-Wol, figure de proue du plus populaire groupe pop de Corée du Nord, Moranbong, qui est entièrement féminin.
Cette formation créée en 2012 compte dix membres, qui seraient toutes choisies par le leader nord-coréen Kim Jong-Un.
Ce groupe a bouleversé la scène musicale nord-coréenne avec ses interprétations de succès occidentaux comme "My Way" ou la chanson-titre du film "Rocky", joués sur des violons électriques
Mais son répertoire compte aussi nombre de chansons patriotiques comme "L'Anniversaire de Maman", qui parle du Parti des travailleurs au pouvoir, ou "Nous l'appelons +Père+", une ode à M. Kim, dont les paroles pourraient enfreindre au Sud les lois sur la sécurité nationale qui prohibent tout éloge du Nord.
Orchestre
Moranbong avait fait les gros titres fin 2015 en annulant un concert à Pékin en raison d'un différend sur la projection prévue d'images de missiles nord-coréens.
Le quotidien sud-coréen Chosun Ilbo avait rapporté que le groupe avait préféré rentrer en Corée du Nord plutôt que de se plier aux pressions des autorités chinoises qui s'étaient offusquées de ces images belliqueuses.
La délégation sud-coréenne comptait notamment lundi de hauts responsables de l'Orchestre symphonique coréen, ce qui laisse penser que des artistes du Nord et du Sud pourraient se produire ensemble.
Les deux Corées doivent également se réunir samedi prochain à Lausanne avec le Comité international olympique (CIO) pour discuter de la participation des athlètes du Nord.
Le Sud a proposé au Nord un défilé en commun lors de la cérémonie d'ouverture, ainsi qu'une équipe féminine unie en hockey sur glace, a annoncé vendredi un ministre sud-coréen.
Les instances olympiques comme la Corée du Sud tiennent à la participation de Pyongyang -qui avait boycotté les jeux de 1988 à Séoul- à des jeux d'hiver qui ont été présentés comme les "Jeux de la Paix".
Voilà deux ans que les tensions sont au plus haut sur la péninsule en raison du programme nucléaire nord-coréen, et les choses se sont encore envenimées du fait des insultes entre M. Kim et le président américain Donald Trump.
'Ignorant'
Pyongyang a longtemps fait la sourde oreille aux invitations aux JO. Mais Kim Jong-Un a surpris tout le monde en évoquant le 1er janvier une présence nord-coréenne à Pyeongchang.
Dès lors, les choses sont allées très vite, culminant avec les premières discussions intercoréennes depuis décembre 2015 qui ont acté la décision nord-coréenne d'envoyer une délégation aux Jeux.
Le président sud-coréen Moon Jae-In, élu en mai en prônant le dialogue, s'est même dit prêt "n'importe quand" à un sommet avec le Nord, mais "dans les bonnes conditions".
Une proposition balayée par Pyongyang qui a jugé dimanche M. Moon "ignorant" et "déraisonnable" s'il exigeait des préconditions à une telle rencontre.
"Le chef de l'exécutif sud-coréen ne doit pas rêver", a affirmé dans un éditorial l'agence officielle KCNA, qui renouait avec sa rhétorique agressive, après avoir les jours précédents, de façon inhabituelle, évoqué respecteusement le "président" Moon.
L'agence s'est en outre montrée menaçante: "Ils doivent savoir que le train et le bus transportant notre délégation aux JO sont toujours à Pyongyang".
Mais un porte-parole du ministère sud-coréen de l'Unification a relativisé ces menaces, les mettant sur le compte de "circonstances et de raisons internes" à la Corée du Nord.
Avec AFP