La République démocratique du Congo, cinquième producteur mondial de cuivre et premier producteur de cobalt de la planète, reste déterminée à réformer sa législation minière et à faire accepter aux entreprises du secteur la perte de certains avantages fiscaux.
"La révision" du code minier de 2002 est "un principe retenu par le gouvernement", a déclaré à l'AFP Valery Mukasa, directeur de cabinet du ministre des Mines congolais, Martin Kabwelulu.
M. Mukasa a fait cette déclaration pour dissiper un "malentendu" autour de propos tenus par M. Kabwelulu mercredi lors d'une conférence minière au Cap (Afrique du Sud).
Le ministre congolais y avait déclaré en substance qu'en l'absence de vote au Parlement sur une nouvelle loi minière, le code minier de 2002 reste celui qui s'applique en RDC.
Ces paroles plutôt anodines ont été interprétés par certains comme l'annonce de l'abandon d'une réforme à laquelle le gouvernement travaille depuis quatre ans.
Quelques heures après la présentation de M. Kabwelulu au Cap, le patronat congolais publiait un communiqué se réjouissant de ce que le gouvernement ait "renoncé" à son projet.
L'ONG de lutte contre le pillage des ressources naturelles des pays en développement Global Witness, qui milite pour la réduction des avantages accordés aux groupes miniers, exhortait pour sa part le gouvernement à ne "pas renoncer à l'amélioration de sa législation minière et à la lutte contre la pauvreté".
Dans un courriel adressé jeudi soir à Global Witness et dont l'AFP a obtenu une copie, M. Mukasa fixe les esprits en écrivant que "le gouvernement [...] n'a pas renoncé à la révision du code minier, bien au contraire".
Le code minier de 2002 a permis de ressusciter un secteur d'activité totalement exsangue à la fin de la deuxième guerre du Congo (2003) et devenu le moteur principal de la forte croissance économique que connaît la RDC (plus de 7% par an depuis 2010).
"La révision du Code est nécessaire", explique néanmoins un conseiller du Premier ministre Matata Ponyo, sous le couvert de l'anonymat, citant quantité d'améliorations et de corrections rendues indispensables à l'usage, après plus de dix ans d'application du texte.
"Moment propice"
Le gouvernement veut aussi bénéficier de la montée en puissance du secteur minier pour augmenter les recettes fiscales afin de hâter le développement d'un pays immense de 85 millions d'habitants parmi les moins développés au monde et où sévit une pauvreté généralisée.
Mais le volet fiscal de la réforme ne passe pas auprès des groupes miniers, pour qui l'ampleur de la hausse des impôts voulue par le gouvernement est déraisonnable et risque de faire fuir les investissements.
Les entreprises minières rappellent qu'elle travaillent dans un environnement très difficile marqué par une pénurie d'électricité compliquant grandement la production et des "tracasseries" permanentes, dans un des pays les plus corrompus de la planète.
Courant 2015, face au décrochage des cours des matières premières, Matata Ponyo, a demandé au Parlement de surseoir à l'examen du projet de nouveau code minier afin de permettre des discussions avec les entreprises du secteur. Celles-ci n'ont pas encore donné de résultats.
"L'évolution actuelle des cours (des matières premières) n'est pas favorable à un dialogue serein", reconnaît le conseiller du Premier ministre.
Selon la Chambre des mines congolaises, la production de cuivre de la RDC a baissé (légèrement) en 2015, pour la première fois après cinq années consécutives de hausse.
Le Congo a "plutôt bien résisté" à la crise provoquée par le ralentissement de la demande chinoise, estime ce syndicat patronal, qui prédit cependant pour 2016 une forte baisse de l'activité minière du pays.
Le gouvernement va "attendre le moment propice" pour remettre son projet de réforme sur la table, estime un responsable d'entreprise minière, "mais compte tenu des difficultés actuelles du secteur, ils ne vont pas en remettre une louche maintenant".
Le Fonds monétaire international (FMI) exhorte régulièrement les autorités de Kinshasa à réformer un secteur minier réputé pour son opacité et à prendre des mesures pour que les fruits de la croissance économique soient plus équitablement répartis au Congo.
Dans une perspective d'intensification de la lutte contre la pauvreté, il juge bien fondée la démarche du gouvernement visant à augmenter la fiscalité des groupes miniers.
Reste à trouver où placer au mieux le curseur de la hausse des impôts. Selon les dernières données disponibles, le secteur minier a rapporté plus de 1,3 milliard de dollars à l'État congolais en 2013, soit environ 16% des recettes fiscales prévues par le gouvernement pour cette année-là.
AFP