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Se disant espionnés par le Maroc, des médias français portent plainte


Journaliste français, co-fondateur et président du journal en ligne Mediapart, Edwy Plenel assiste à une conférence de presse sur le lien du lanceur d'alerte portugais Rui Pinto avec les "Football Leaks" et les "Luanda Leaks", le 14 février 2020.
Journaliste français, co-fondateur et président du journal en ligne Mediapart, Edwy Plenel assiste à une conférence de presse sur le lien du lanceur d'alerte portugais Rui Pinto avec les "Football Leaks" et les "Luanda Leaks", le 14 février 2020.

Deux médias français, le site d'information Mediapart et l'hebdomadaire satirique Le Canard Enchaîné, ont annoncé lundi qu'ils allaient déposer des plaintes à Paris, après des révélations sur l'espionnage des téléphones de certains de leurs journalistes par le Maroc, via le logiciel israélien Pegasus.

Mediapart a confirmé lundi que les numéros de téléphones portables du cofondateur du site, Edwy Plenel et de la journaliste Lénaïg Bredoux "figurent parmi les 10.000 que les services secrets du Maroc ont ciblés en utilisant le logiciel espion fourni par la société israélienne NSO".

Lénaïg Bredoux est responsable éditoriale aux questions de genre à Mediapart, en charge d'enquête sur les violences sexistes et sexuelles, et a co-signé en 2012 un livre "Tunis Connection, enquête sur les réseaux franco-tunisiens sous Ben Ali".

"Pendant plusieurs mois, l’appareil répressif du royaume chérifien a ainsi violé l’intimité privée de deux journalistes, porté atteinte au métier d’informer et à la liberté de la presse, volé et exploité des données personnelles et professionnelles", a dénoncé le journal en ligne, après la publication des révélations sur Pegasus par un consortium de médias (dont Le Monde, le Guardian et le Washington Post).

Le média d'investigation avance que le but était d'essayer de "faire taire les journalistes indépendants au Maroc, en cherchant à savoir comment nous enquêtions (...)".

C'est pourquoi il indique avoir décidé de déposer plainte dès ce lundi au nom de ses deux journalistes pour que la justice puisse "mener une enquête indépendante sur cet espionnage d'ampleur organisé en France par le Maroc".

"Évaluer le dommage"

Contacté par l'AFP, le Canard Enchaîné, qui fait partie, selon Le Monde, des médias français dont des journalistes ont été visés, a également assuré qu'il allait saisir la justice. "Nous allons porter plainte contre X avec constitution de partie civile", a précisé Michel Gaillard, qui préside la société d'édition du journal, ajoutant que le dossier de cette plainte était en cours de constitution.

L'ancienne journaliste de l'hebdomadaire Dominique Simonnot, qui fait partie des personnalités visées par cet espionnage, "va déposer plainte", a-t-elle également indiqué à l'AFP.

"Je suis absolument furieuse depuis que je l'ai appris. Même si j'ai toujours fait attention au téléphone, j'ai du mal à évaluer le dommage que ça a causé", a-t-elle déclaré, précisant que "l'intrusion a commencé en 2019 et n'a duré que quelques mois".

Le groupe public France Médias Monde, qui regroupe RFI, France 24 et la radio arabophone MCD, dont des collaborateurs ont aussi été ciblés, s'est quant à lui indigné "de tels agissements liberticides pratiqués par certains États peu respectueux des droits fondamentaux de la personne", et a appelé "les autorités compétentes, à l'échelle nationale et internationale, à se saisir de cette affaire".

Contacté par l'AFP, la direction de France Télévisions s'est dite "stupéfaite et indignée par le système mis au jour par le consortium". "S'il s'avère que des journalistes (de France Télévisions) sont présumés victimes, nous les accompagnerons dans leurs procédures judiciaires, mais à ce stade nous n'avons pas de confirmation officielle", a déclaré à l'AFP Laurent Guimier, directeur de l'information du groupe.

Des organisations ont également exprimé leur indignation, comme la Fédération internationale des journalistes (FIJ) qui a condamné fermement "toute tentative d'ingérence dans les communications privées des journalistes", ou l'association Reporters sans frontières qui envisage de déposer des plaintes dans plusieurs pays et assure qu'elle fera tout "pour que NSO soit condamnée pour les forfaits dont elle est coupable et les tragédies qu'elle rend possibles".

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