Le 7 janvier, au terme de la mutinerie, le président ivoirien Alassane Ouattara avait annoncé à la télévision qu'un accord avait été trouvé. Le ministre de la Défense Alain-Richard Donwahi avait pris rendez-vous ce 13 janvier avec les mutins à Bouaké, deuxième ville du pays, pour mettre un point final au mouvement.
Mais, ce vendredi, les négociations entamées vers 14h TU se sont interrompus à 22 h alors que les mutins, visiblement mécontents, ont repris le contrôle des accès à Bouaké en soirée.
Dans l'après-midi, ils avait ordonné en tirant en l'air aux nombreux journalistes présents de quitter les environs de la résidence du préfet où avaient lieu les discussions.
Ils avaient auparavant dispersé à deux reprises dans la matinée en tirant en l'air également des manifestants qui protestaient contre leurs agissements.
"Libérez Bouaké !", "On a faim, on veut travailler !", scandaient notamment les manifestants.
Bouaké était une ville morte dans l'après-midi avec tous les commerces fermés. Des tirs sporadiques sont régulièrement audibles, ont constaté des journalistes de l'AFP tout au long de la journée et de la soirée.
Comme la semaine dernière, plusieurs autres casernes dans le pays ont montré leur solidarité avec les mutins en tirant également en l'air.
Il n'y avait pas eu de victime la semaine dernière.
De nombreux coups de feu ont ainsi été tirés vendredi dans la caserne d'Akouedo, le plus grand camp militaire d'Abidjan, selon plusieurs témoins joints par VOA Afrique ainsi qu'au camp Gallieni.
De sources sécuritaires concordantes, des tirs ont aussi été entendus à Odienné (nord-ouest) et à Bondoukou (cente-Est).
Selon une source proche du ministère de la Défense qui a pu joindre la délégation ministérielle en début de soirée, "les négociations se poursuivent dans la sérénité à Bouaké malgré des tirs entendus dans la ville". Toutefois, samedi dernier, les militaires en colère avaient empêché le ministre et sa délégation de quitter la résidence du sous-préfet pendant plus de deux heures.
Dans la nuit de mercredi puis jeudi matin, les militaires avaient tiré en l'air à Bouaké pour "mettre la pression" sur le gouvernement. "Nous attendons notre argent demain (vendredi). Ce qui compte c'est l'argent", avait déclaré l'un des mutins à l'AFP.
Les revendications des mutins, dont beaucoup sont d'anciens rebelles, sont matérielles. Elles marquent le retour d'un problème récurrent dans un pays sorti en 2011 de dix ans de rébellion dont Bouaké, ville de 1,5 million d'habitants, fut la capitale.
Les soldats réclament le paiement de primes, des augmentations de solde, une promotion plus rapide entre les grades ainsi que des logements.
De source proche du dossier, ils réclament notamment environ de 10 millions de francs CFA par personne (15.000 euros), un montant jugé "complètement déraisonnable" par une autre source militaire.
En novembre 2014, déjà, une vague de protestation de soldats était partie de Bouaké et s'était également étendue à Abidjan et d'autres villes.
La rébellion du nord qui coupa la Côte d'Ivoire en deux de 2002 à 2011 était favorable à M. Ouattara. Le sud était tenu par les forces loyales à l'ex-président Laurent Gbagbo.
La Côte d'Ivoire a mis en route en 2016 une ambitieuse loi de programmation militaire jusqu'en 2020. Elle prévoit modernisation et achats d'équipements pour 1,2 milliard d'euros et une refonte des effectifs.
L'armée ivoirienne - 22.000 hommes au total - compte trop de gradés comparativement aux nombres de soldats.
Le pays a achevé mercredi une réorganisation politique. Le président a nommé mardi l'ancien Premier ministre Daniel Kablan Duncan vice-président, poste nouvellement créé après le référendum constitutionnel de novembre, et Amadou Gon Coulibaly, ex-secrétaire général de la présidence, nouveau Premier ministre. Ce dernier a formé mercredi un nouveau gouvernement plus restreint que la précédente équipe.