Attendu en milieu de journée dans le Bureau ovale, le nouvel homme fort du premier exportateur mondial de pétrole entame une vaste offensive de charme qui le mènera à travers les Etats-Unis, d'Est en Ouest, pendant près de trois semaines.
Dans une longue interview accordée à CBS diffusée juste avant son arrivée, il a peint une image idyllique d'un royaume en profonde transformation, attaché à l'égalité homme-femme, le respect des droits de l'homme ou encore le règne de la loi.
Mais la purge anti-corruption dans laquelle plusieurs princes du royaume ont été retenus dans le luxueux hôtel Ritz-Carlton de Ryad a suscité de réelles interrogations --dans le monde diplomatique comme économique-- sur la façon dont le futur roi assoit son pouvoir.
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"Il y a beaucoup de questions sur l'impact des détentions du Ritz sur la confiance des investisseurs", souligne Lori Plotkin Boghardt, ancienne analyste de la CIA qui travaille aujourd'hui au Washington Institute for Near East Policy.
La politique étrangère du prince de 32 ans surnommé "MBS" suscite aussi des crispations à Washington. Et des voix s'élèvent pour appeler Donald Trump à ne pas soutenir aveuglément celui qui pourrait diriger le royaume sunnite pendant le demi-siècle à venir.
Mettant en relief "la fascination" du magnat de l'immobilier pour les Saoudiens, les anciens diplomates Aaron David Miller et Richard Sokolsky exhortent ce dernier à la vigilance et l'exigence, dans une tribune publiée dans USA Today.
"Nous devrions saluer les réformes que MBS promet pour la société saoudienne (...) mais nous ne devons pas être envoûtés par un roi en devenir dont les choix politiques très tranchés ne sont pas toujours alignés avec les nôtres", soulignent-ils.
Boston, New York, San Francisco
Le sommet que Washington espère organiser cette année à Camp David avec les six pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) pourrait s'avérer difficile à concrétiser en l'absence de sortie de crise avec le Qatar.
"Le président soulignera l'importance d'un Conseil de coopération du Golfe (CCG) fort et uni comme rempart aux menaces qui pèsent sur la région", a souligné un responsable américain sous couvert d'anonymat, sans pour autant s'engager sur une date ou un calendrier.
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La sanglante guerre civile au Yémen devait figurer en bonne place dans les discussions du jour. Les combats entre les forces gouvernementales, appuyées par l'Arabie saoudite, et les Houthis, soutenus par l'Iran, ont fait près de 10.000 morts et mis le pays au bord de la famine.
A Washington, des élus réclament haut et fort la fin de l'assistance militaire des Etats-Unis à la coalition menée par Ryad.
Le Sénat américain votera sur ce point mardi en fin d'après-midi, quelques heures après le face-à-face entre le président septuagénaire et le prince trentenaire.
"Nous estimons que, puisque le Congrès n'a pas déclaré de guerre ni autorisé l'emploi de la force militaire dans ce conflit, l'engagement des Etats-Unis au Yémen est anticonstitutionnel et non-autorisé, et que le soutien militaire américain à la coalition saoudienne doit cesser", a souligné Bernie Sanders, l'un des trois sénateurs des deux bords ayant réclamé ce débat.
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Après Washington, MBS se rendra à Boston puis à New York à la rencontre des milieux financiers. Il s'entretiendra aussi avec le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres.
Il est ensuite attendu à partir du 30 mars sur la côte Ouest des Etats-Unis, à Los Angeles et San Francisco, auprès des géants des nouvelles technologies comme Google et Apple, du divertissement mais aussi de la défense comme Lockheed Martin. Il se rendra aussi à Seattle, berceau d'Amazon, et enfin, le 7 avril, à Houston à la rencontre de l'industrie pétrolière.
Ryad affiche en particulier sa volonté d'accélérer son programme nucléaire civil. Objectif: construire 16 réacteurs dans les 20 prochaines années, pour un coût d'environ 80 milliards de dollars, avec la volonté farouche d'obtenir transferts de technologie dans le cadre de la construction.
Avec AFP