Il y a plusieurs mois déjà, sa maladie - un cancer du côlon - avait lancé les hostilités entre les trois vice-présidents d'un parti dont l'histoire a souvent été le théâtre de violentes luttes internes.
Ces rivalités ont ouvert un boulevard au nouveau président du pays Emmerson Mnangagwa et à son parti, la Zanu-PF, pour les élections générales prévues d'ici juillet.
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Cacique de l'ancien régime, M. Mnangagwa, surnommé le "Crocodile", a pris la tête du Zimbabwe après la démission en novembre dernier du président Robert Mugabe au terme d'un règne sans partage de trente-sept ans.
"Tsvangirai était le ciment du MDC. Maintenant qu'il n'est plus là, nous sommes à la veille d'une rupture majeure", a prédit à l'AFP l'analyste politique zimbabwéen Alexander Rusero.
L'un des trois vice-présidents du parti, Elias Mudzuri, se prévaut d'avoir été nommé chef intérimaire du MDC par M. Tsvangirai quelques jours avant sa mort.
"C'est moi et personne d'autre", a-t-il tranché dans un entretien accordé à la télévision publique sud-africaine SABC après s'être rendu au chevet de M. Tsvangirai dans un hôpital de Johannesburg.
"Tout le monde doit respecter l'autorité qui m'a été conférée par le président et faire en sorte de travailler en vue (...) de remporter les élections de 2018", a-t-il insisté.
Début février, un autre vice-président du MDC, Nelson Chamisa, avait été nommé président par intérim dans un communiqué diffusé par le porte-parole de M. Tsvangirai, Luke Tamborinyoka.
Moins de vingt-quatre heures après l'annonce de la disparition du chef du parti, Nelson Chamisa a convoqué jeudi une réunion de sa direction au siège de son parti, dans la capitale Harare, pour officialiser sa prise de contrôle pour une période de douze mois.
Des centaines de militants s'y sont réunis pour honorer la mémoire de M. Tsvangirai. A l'exception des deux autres vice-présidents du parti, Thokozani Khupe et Elias Mudzuri, qui ne reconnaissent pas son autorité.
- 'Quelle honte !' –
Furieuse, Thokozani Khupe a vertement critiqué l'attitude de son collègue Chamisa.
"Tsvangirai est mort et tu convoques une réunion pour t'autoproclamer chef. Quelle honte !", a-t-elle éructé dans la presse. "Tu ne peux même pas attendre que Tsvangirai soit enterré avant de lancer tes petites magouilles pour prendre le pouvoir."
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Selon les analystes, Nelson Chamisa rassemble derrière son nom le plus grand nombre de militants du parti et se présente en favori de la course à la succession.
Le MDC a longtemps représenté une réelle menace pour le régime du président Robert Mugabe.
En 2008, Morgan Tsvangirai avait réussi à s'inviter aux portes du pouvoir en arrivant en tête du premier tour de la présidentielle.
Devant le déchaînement de violences ordonné par le pouvoir contre ses partisans, qui avaient fait quelque 200 morts, il avait préféré renoncer à se présenter au second tour, permettant à Robert Mugabe de se maintenir au pouvoir.
Soumis à la répression constante de la police du régime, le MDC a souffert de nombreuses fractures depuis sa création en 1999.
L'an dernier, Morgan Tsvangirai était parvenu à recoller les morceaux avec ses anciens alliés Tendai Biti et Welshman Ncube, qui avaient pris leurs distances avec lui, pour refaire front commun lors des élections de 2018.
La mort du fondateur du MDC a tout remis en cause.
"Tous ces jeux de pouvoirs ont lieu pendant une période de deuil. Je crains qu'ils affaiblissent le MDC et toute l'opposition", a pronostiqué à l'AFP le professeur de sciences politiques Eldred Masunungure, de l'université du Zimbabwe.
La dépouille de Morgan Tsvangirai doit être rapatriée pendant le week-end, avant ses funérailles prévues d'ici quelques jours.
Avec AFP