"On accuse souvent les Italiens de ne pas nous donner l'identité des cadavres" de migrants tunisiens repêchés dans leurs eaux, a souligné Romdhane Ben Amor, du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES).
Le gouvernement tunisien doit lui aussi "répondre aux attentes des familles des personnes disparues dans le cadre de la migration non réglementaire, qui ont le droit de connaître le sort de leurs enfants", a poursuivi l'ONG en évoquant une "tragédie humaine".
A l'approche de la journée internationale des migrants, l'ONG a ainsi demandé la création d'une base de données recueillant les caractéristiques y compris ADN des migrants morts en mer, afin d'aider leurs familles de par le monde à les retrouver.
Rien qu'en Tunisie, des centaines de familles "sont dans la peine" car elles n'ont aucune certitude sur le sort de leurs proches portés disparus en mer, a relevé M. Ben Amor.
En raison des courants, nombre de corps échouent à proximité de Zarzis, dans le sud de la Tunisie, où un ancien pêcheur, Chamseddine Marzoug, enterre bénévolement les migrants sur un terrain vague.
Plusieurs centaines de dépouilles sont ainsi inhumées avec comme seule identité un numéro, qui permet de retrouver un sommaire compte-rendu du médecin légiste local.
"Nous demandons un cimetière respectueux et des tests ADN" a indiqué M. Marzoug à l'AFP, "parce que peut-être un jour des gens viendront chercher leurs familles".
D'autres corps ont été enterrés dans plusieurs lieux de Tunisie, mais à défaut de prélèvements ADN, eux non plus ne pourront jamais être localisés par leurs proches.
Les tests ADN sont le moyen le plus fiable d'identifier les personnes disparues. Ils ont été utilisées notamment dans des pays comme la Bosnie-Herzégovine où de nombreuses personnes portées disparues après la guerre ont été retrouvées dans des charniers où elles avaient été enterrées sans être identifiées.
La Tunisie a connu cet automne un pic d'émigration clandestine, qui s'explique selon le FTDES par plusieurs facteurs économiques, sociaux et sécuritaires, dont un mal-être persistant chez les jeunes Tunisiens, désabusés sept ans après la révolution qui a abouti à la chute de la dictature.
En octobre, une cinquantaine de personnes, en majorité des Tunisiens, étaient mortes dans la collision entre un bateau de migrants et un navire militaire, provoquant l'émoi dans le pays, et plusieurs candidats à l'exil sont toujours portés disparus.
Avec AFP