Cette technologie, aux tout premiers stades de développement, pourrait aussi améliorer le contrôle de la prothèse et minimiser, voire éliminer, la sensation de membre fantôme qui affecte environ 80 % des amputés, selon ces scientifiques.
Leurs travaux, signés notamment par Alex Chortos et Andre Berndt de l'Université Stanford en Californie, sont publiés jeudi 15 octobre dans la revue américaine "Science". Les auteurs expliquent avoir utilisé des circuits organiques souples et des capteurs de pression pour reproduire la sensibilité de la peau. Ils précisent avoir pu transmettre ces signaux sensoriels à des cellules cérébrales de souris en laboratoire en recourant à l'optogénétique.
Nouveau champ de recherche combinant l'optique et la génétique, l'optogénétique est principalement basée sur une protéine qui possède la propriété d'être activée par la lumière bleue. Les auteurs sont parvenus à convertir la pression statique d'un objet sur la peau en signaux numériques comparables aux différents degrés de force mécanique que peut ressentir une peau humaine. Pour les capteurs, ils ont utilisé des nanotubes de carbone moulés en forme pyramidale, particulièrement efficace pour canaliser les signaux du champ électrique des objets à proximité. Ces derniers sont captés par des électrodes, et ce d'une manière à maximiser la sensibilité.
Des travaux jugés prometteurs
Le transfert des signaux numériques captés par la peau artificielle jusqu'aux neurones provenant du cortex cérébral de souris a présenté une grande difficulté : les protéines utilisées en optogénétique ne stimulent en effet pas les cellules neuronales suffisamment longtemps pour permettre de ressentir ces signaux numériques, expliquent les chercheurs. Ces derniers ont donc dû fabriquer de nouvelles protéines optogénétiques, capables de laisser de plus longs intervalles entre les stimulations pour permettre aux neurones de réagir.
La peau des mammifères est formée de couches multiples de matériaux viscoélastiques et peut être étirée jusqu'à 125 % de ses dimensions au repos sans perte apparente de sensibilité aux stimulations externes, telles que la pression ou la température, indiquent les chercheurs.
Dans un article également publié dans "Science" commentant cette étude, Polina Anikeeva et Ryan Koppes, du laboratoire de recherche électronique du Massachusetts Institute of Technology (MIT), notent que reproduire les propriétés mécaniques et les fonctions de la peau "demeure un défi difficile en ingénierie" tout en jugeant ces travaux prometteurs.
Ces chercheurs, qui n'ont pas participé à l'étude, soulignent l'accélération des progrès dans le champ des circuits électroniques souples et organiques qui permettent de développer des capteurs épidermiques miniatures. Cependant, ces derniers sont souvent limités par leur alimentation électrique, notent-ils.
Avec AFP