L'audience de deux suspects noirs dans l'assassinat d'un éleveur blanc en Afrique du Sud s'est ouverte vendredi sous haute tension, entre des fermiers blancs en colère, d'un côté et des radicaux de gauche exaspérés de l'autre, dans la ville de Senekal, à quelque 300 km au sud de Johannesburg, selon plusieurs sources concordantes.
Des dizaines de fermiers blancs, qui accusent le gouvernement de ne pas les protéger contre les crimes violents, ont fait le siège devant le tribunal de Senekal.
À quelques centaines de mètres sur la route, des partisans de l’EFF, la gauche radicale qui dit représenter les Sud-Africains noirs pauvres se sentant exclus de la prospérité post-apartheid, ont aussi organisé une contre-marche à laquelle ont participé participé des milliers de manifestants venus de plusieurs régions du pays.
Les deux camps rivaux se sont lancé des insultes et des menaces avant une audience dans une affaire de meurtre qui a révélé des tensions raciales encore frémissantes, 26 ans après la fin de l'apartheid.
L'accusation avait argué de la sensibilité de cette affaire, alors que la défense ne s'opposait pas à la médiatisation des débats.
L'affaire a commencé au début du mois avec la découverte du corps Brendan Horner, éleveur blanc de 22 ans, pendu sur un poteau dans sa ferme. La macabre découverte a été suivie par l'arrestation de deux suspect noirs et une manifestation tendue d'éleveurs blancs, avec dérapages verbaux et incendie d'une voiture de police.
Les deux accusés, Sekwetje Isaiah Mahlamba et Sekola Piet Matlaletsa, ont tous deux indiqué qu'ils avaient l'intention de plaider non coupable, selon le quotidien The Sowetan.
Le président Cyril Ramaphosa et plusieurs organisations appellent au calme.
Environ 70% des terres agricoles privées en Afrique du Sud appartiennent à des Blancs, qui représentent moins de 9% de la population du pays qui compte 58 millions d’habitants.
La question de l'attribution des terres est un vieux problème qui remonte au temps de l'apartheid.
En 1913, le gouvernement dirigé par la minorité blanche avait adopté la loi sur les terres des autochtones (Natives Land Act), qui officialisait le délogement par la force des milliers de familles noires pour les relocaliser dans des townships sans planification urbaine et dépourvus de services municipaux tels que l'électricité, l'eau courante ou un système de traitement des eaux usées.
Cette loi, que le gouvernement actuel décrit comme le "péché originel" du pays, avait également plafonné à 7 % la superficie du pays que la population noire, pourtant majoritaire, pouvait occuper. Ce plafond a été porté à 13 % en 1936, selon les archives officielles du gouvernement sud-africain.