Brésil : l'ex-ministre des finances de Lula et Rousseff arrêté dans l'enquête Petrobras

L'ex-ministre des Finances des anciens présidents brésiliens Luiz Inacio Lula da Silva et Dilma Rousseff, Guido Mantega à Brasilia, 20 février 2014.

L'ex-ministre des Finances des anciens présidents brésiliens Luiz Inacio Lula da Silva et Dilma Rousseff, Guido Mantega, a été arrêté jeudi à Sao Paulo dans le cadre d'un nouveau rebondissement du tentaculaire scandale de corruption Petrobras.

M. Mantega, une personnalité de poids au sein du Parti des Travailleurs (PT, gauche) lorsque ce dernier était au pouvoir (2013-2016), a été arrêté à l'aube dans un hôpital de Sao Paulo où il accompagnait sa femme qui subissait une intervention chirurgicale, ont indiqué les enquêteurs et son avocat.

Placé en garde à vue, il a été ensuite conduit par les enquêteurs à son appartement de Sao Paulo où une perquisition a été effectuée, ont précisé les procureurs chargés du dossier Petrobras, lors d'une conférence de presse à Curitiba (sud-est) où l'enquête est centralisée.

Sept autres personnes ont été interpellées.

M. Mantega a été ministre des Finances de Lula et de Mme Rousseff de 2006 à 2015, avant d'être remplacé par le banquier Joaquim Levy.

Son interpellation intervient deux jours après la mise en accusation de l'ancien président Lula pour "corruption et blanchiment d'argent" par le juge anticorruption Sergio Moro, qui dirige cette enquête dévastatrice pour le PT.

Elle suit sa mise en cause par l'entrepreneur brésilien Eike Batista lors d'un "témoignage spontané" recueilli en juin, a déclaré le procureur Fernando Carlos dos Santos Lima.

M. Batista a affirmé qu'en décembre 2012, M. Mantega, alors ministre des Finances, lui avait demandé d'effectuer un paiement sur un compte offshore de 2,35 millions de dollars pour apurer une dette électorale du PT.

Pour justifier ce paiement effectué en avril 2014, l'entreprise OSX, du groupe d'Eike Batista, avait "signé un contrat de prestations fictives" avec une entreprise de Monica Santana, l'épouse de Joao Santana, le publicitaire responsable des campagnes présidentielles de Dilma Rousseff en 2010 et 2014.

Campagne présidentielle ?

Les enquêteurs soupçonnent que ce paiement visait à régler une partie de la dette du PT au couple Santana, "probablement liée à la campagne présidentielle de 2010", a précisé le procureur dos Santos Lima.

L'entreprise OSX avait obtenu, en consortium avec le groupe de construction Mendes Junior, des contrats de sous-traitance de Petrobras pour la construction de plateformes pétrolières, "sans avoir aucune capacité de les honorer", a souligné le procureur.

"Nous sommes convaincus que la passation de ces marchés à donné lieu à des pratiques de corruption" et à des paiements de 2,3 millions de dollars de pots-de-vins "à un intermédiaire du PMDB", le parti centriste de l'actuel président Michel Temer, qui était alors l'allié incontournable du PT au sein de l'ex-coalition au pouvoir, a-t-il dit.

Placés en détention provisoire en février dernier, Joao Santana et son épouse Monica ont été remis en liberté sous caution le 1er août, et collaborent désormais avec les enquêteurs en vue d'obtenir de futures remises de peine

Ils sont soupçonnés notamment d'avoir reçu 7,5 millions de dollars du consortium de construction Odebrecht, en paiement indirect d'une partie de leurs prestations pour les campagnes électorales du PT.

Le géant du BTP Odebrecht est au coeur du scandale Petrobras.

L'enquête a démontré qu'il avait organisé, avec ses concurrents, un cartel pour truquer les marchés de sous-traitance passés par Petrobras, avec la complicité d'ex-directeurs du groupe étatique nommés sur indication de poids lourds de l'ancienne coalition dirigée par le PT.

Ces marchés étaient surfacturés de 1 à 5% en échange de pots-de-vin dont une partie étaient reversés pour financer les campagnes du PT et de ses principaux alliés de gouvernement de l'époque, le PMDB de Michel Temer et le PP, une autre formation centriste.

Ancien vice-président de Dilma Rousseff devenu son rival, M. Temer a assumé la présidence du Brésil le 1er septembre, après la destitution controversée de la dirigeante de gauche pour maquillage des comptes publics, sans lien avec le dossier Petrobras.

Petrobras a évalué en 2014 à deux milliards de dollars ses pertes liées à ces opérations frauduleuses. Les enquêteurs chiffrent pour leur part le "préjudice total" à 12,8 milliards de dollars au taux actuel.

Avec AFP