La CPS, créée en 2015 par le gouvernement sous le parrainage de l'ONU, est chargée de juger les crimes de guerre et contre l'Humanité commis depuis 2003. Elle avait ouvert son premier procès le 25 avril dernier, ajourné dès la première audience sans que les accusés soient entendus, en raison de l'absence de leurs avocats.
Issa Sallet Adoum, Ousman Yaouba et Tahir Mahamat, membres d'un des plus puissants groupes armés qui terrorisent les populations depuis des années, les 3R (Retour, Réclamation et Réhabilitation), sont jugés pour crimes de guerre et crimes contre l'Humanité, accusés du massacre, le 21 mai 2019, de 46 civils dans des villages du nord-ouest, Koundjili et Lemouna.
Les trois hommes, dans leur combinaison orange de détenus, sans menottes et séparés par une épaisse vitre, sont restés impassibles, sous leurs masques anti-covid, à la lecture de la litanie de leurs crimes présumés et des noms des victimes: "meurtres et tortures, autres atteintes à la dignité des personnes, notamment des traitements inhumains et autres actes dégradants".
Lire aussi : Report du premier procès de la Cour pénale spéciale en CentrafriquePuis Adoum et Yaouba ont pris la parole et leurs premiers mots ont été pour présenter des "excuses au peuple centrafricain", sans qu'ils reconnaissent toutefois les faits dont ils sont accusés. Mahamat n'a exprimé aucun remord. L'audition des trois hommes a duré environ deux heures et l'audience reprendra mardi.
"La personne qui a donné l'ordre d'attaquer Koundjili et Lemouna est Sidiki Abass", a affirmé Issa Sallet Adoum, sans plus de détails. Les 3R avait annoncé la mort de leur chef, Sidiki Abass, en avril 2021.
"Ils essayent de jeter l'opprobre sur les uns et sur les autres(...) Mais les victimes réelles, les rescapés de ces incidents sont là (...) On va les écouter et ils vont édifier la cour pour pouvoir faire assoir une décision saine", a estimé Claudine Bagaza Dini, avocate des parties civiles.
Les travaux de la CPS ont été lancés en octobre 2018 avec les premières enquêtes. Cette cour spéciale est composée de juges et procureurs originaires -outre de Centrafrique- notamment de France, du Togo et de République démocratique du Congo (RDC).
Lire aussi : Le premier procès de la cour spéciale en Centrafrique renvoyé à l'ouvertureLa Centrafrique, deuxième pays le moins développé au monde selon l'ONU, est le théâtre depuis 2013 d'une guerre civile, très meurtrière dans ses premières années mais qui a baissé d'intensité depuis 2018. Elle a opposé dans les premières années des milices à majorité musulmane coalisées au sein de l'alliance Séléka, à d'autres -les anti-balakas-, dominées par les chrétiens et animistes, l'ONU accusant les deux camps de crimes de guerre et contre l'Humanité.
Elle se poursuit aujourd'hui entre des groupes armés rebelles, issus des Séléka et anti-balakas parfois réunis, et l'armée du président Faustin Archange Touadéra épaulée par des centaines de paramilitaires russes.