La patronne de la Francophonie plaide pour plus d'humanisme dans la crise des réfugiés

Michaëlle Jean, secrétaire générale de l'OIF

Née à Haïti avant d'immigrer au Canada, Michaëlle Jean appelle les pays d'accueil des réfugiés à agir "avec humanisme", avant l'ouverture du 16e sommet de l'OIF à Antananarivo.

"Il y a une nécessité d'agir avec humanisme car c'est toujours une tragédie: tout le monde préfère vivre chez soi. Nous insistons sur le respect des droits des réfugiés et de leur dignité", plaide la secrétaire générale de l'OIF dans un entretien à l'AFP.

"La crise migratoire nous interpelle, nous sommes dans la Francophonie à la fois des pays de départ, de transit, de destination et d'accueil", poursuit celle qui refuse de distinguer "réfugié politique et réfugié économique".

La crise migratoire touche personnellement l'ancienne gouverneure générale du Canada, qui a connu l'exil à l'âge de 11 ans en quittant sa ville natale de Port-au-Prince pour le Québec.

"C'est un chapitre de ma vie, je suis passée par là. Je sais ce que c'est que de devoir partir forcée, cette peur d'avoir vécu la terreur et d'avoir à trouver asile ailleurs", explique-t-elle dans son bureau provisoire du centre de conférences d'Antananarivo.

Samedi et dimanche, près de trente chefs d'Etat sont attendus dans la capitale malgache.

Le président français François Hollande devrait notamment y croiser le Gabonais Ali Bongo, récemment réélu dans des conditions très controversées, le Tchadien Idriss Deby ou le Premier ministre canadien Justin Trudeau.

"Croissance partagée, développement responsable et conditions de stabilité du monde et de l'espace francophone", le thème très large du sommet devrait largement laisser la place aux sujets d'actualité, à commencer par la lutte contre le terrorisme.

Les pays francophones "ne sont pas épargnés et sont durement frappés par la menace terroriste. Mais nous devons faire front ! Nous ne pouvons pas baisser les bras, chacun dans son deuil national", plaide Mme Jean.

- 'Mutualisation' -

"Nous devons agir dans un plus grand souci de mutualisation: à la fois de nos ressources, de nos expériences, de nos renseignements. Nous voyons des forces de pays francophones s'unir, des forces multinationales, comme par exemple dans la lutte contre Boko Haram", poursuit-elle.

Nigeria, Cameroun, Niger, Tchad et Bénin ont uni leurs forces armées au sein d'une Force multinationale mixte (FMM) pour lutter contre les jihadistes nigérians.

Plusieurs fois cette année, Michaëlle Jean s'est exprimée devant le conseil de sécurité de l'ONU, une première pour un chef de l'OIF.

Son objectif consiste à faire de son institution un partenaire "incontournable" des organisations internationales dans la résolution des crises mondiales.

"Nous sommes en train d'amener les organisations internationales à travailler différemment, nous sommes en train de briser cette situation où chacun agit de son côté", assure la patronne de l'OIF.

Pour elle, la Francophonie doit être bien plus qu'un simple espace linguistique.

"La langue est un trait d'union, mais la Francophonie est beaucoup plus que ça. C'est aussi un engagement à promouvoir des valeurs universelles: le respect du droit et des libertés, la démocratie, l'engagement autour d'une culture de la paix", insiste-t-elle.

Et lorsqu'on l'interroge sur les pays membres de l'OIF qui ne respecteraient pas ces "valeurs universelles", Michaëlle Jean préfère citer l'exemple des élections "bien tenues" en mars au Bénin ou le rôle joué par la jeunesse du Burkina Faso dans la chute du régime de Blaise Compaoré en 2014.

Avec AFP