Dans le deuxième pays le plus pauvre du monde selon l'ONU, le quotidien est difficile pour les habitants de la capitale. Et le regain de tensions à l'approche des élections présidentielle et législatives de dimanche fait renaître des angoisses bien connues dans un pays ravagé par la guerre civile.
Alors qu'elle déambule entre les travées, Cynthia doit calculer. Femme de ménage, elle est la seule à travailler dans sa famille et doit aussi nourrir les enfants de plusieurs de ses parents qui lui ont été confiés.
"C'est difficile, mais grâce à Dieu, on se débrouille", dit-elle en souriant. "La bassine de manioc, ça coute 2.500 FCFA (3,8 euros), c'est un peu moins cher qu'avant".
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Deux mois auparavant, la même bassine coûtait presque le double. Les prix fluctuent abondamment dans la capitale de ce pays enclavé qui importe l'essentiel de ses biens de consommation du Cameroun voisin.
Pour arriver jusqu'à Bangui, ils empruntent la route nationale 1, jalonnée de péages et menacée par l'insécurité entretenue par les groupes armés qui contrôlent les deux tiers du territoire centrafricain.
Depuis vendredi, cette route fait la cible d'attaques de ces groupes qui cherchent à perturber les élections.
"On était dans une stagnation économique, mais le calme amenait quelques perspectives", s'inquiète Laurence Nacif, président du Patronat centrafricain. "Nous espérons que la route du Cameroun reste ouverte pour maintenir l'import-export".
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"Peur pour nos enfants"
Les prix pourraient encore flamber à Bangui. Le panier moyen d'articles de survie (PMAS), qui représente le minimum d'articles censés répondre aux besoins d'un ménage de cinq personnes pour une durée d'un mois, y avoisine les 77.000 FCFA (100 euros), selon un rapport de l'ONG REACH publiée en octobre.
Et ce alors que le revenu médian est d'environ 27 euros par mois, selon la Banque mondiale, et qu'une grande partie de la population est sans emploi.
Malgré les richesses en diamants et bétail du pays, près de 70 % des Centrafricains vivent en-dessous du seuil international de pauvreté (moins d'1,60 euro par jour).
Les habitants de la capitale n'ont pas oublié les horreurs de 2013, après qu'une coalition de groupes armés à dominante musulmane, la Séléka, a renversé le président François Bozizé. Et plongé le pays dans un tourbillon sanglant d'affrontements communautaires, avec la contre-insurrection de milices anti-balaka essentiellement chrétiennes et animistes.
Les violences à Bangui et dans les provinces entre Séléka et anti-balaka avaient fait des milliers de morts.
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Même si les violences ont baissé d'intensité depuis 2018, les groupes armés continuent de mener sporadiquement des attaques contre civils et forces de sécurité, pour des motifs aujourd'hui plus criminels que communautaristes.
Et les attaques des derniers jours réactivent les mauvais souvenirs. L'inquiétude gagne la capitale.
"Je suis inquiète pour notre pays, à cause des rebelles qui viennent, on a peur pour nos enfants", murmure d'une voix lasse Geneviève, employée dans un commerce.
Craintes, manque de perspective, difficultés quotidiennes... certains Centrafricains sont épuisés et lassés de leur pays, à l'image de Mathias, agent de sécurité.
"Qu'est-ce qu'on peut faire ici ? Y'a rien ici ! C'est que les bandits qui s'en sortent !", s'emporte-t-il. "Qu'est-ce que je vais dire à mes enfants ? Je pourrais même pas leur payer l'école ! Ils vont devoir aller braquer, voler ? Franchement mon frère, je veux juste quitter ce pays".