"Il s'agit du début des discussions, du début d'un processus de négociations internationales sur la taxation des plus fortunés", a commenté mardi Lucas Chancel, économiste et co-directeur du WIL, à l'occasion d'un webinaire consacré aux inégalités mondiales. Les dirigeants du G20 ont endossé lundi l'idée de coopérer pour taxer "effectivement" les personnes très fortunées, une initiative que poussait le président brésilien Lula et saluée comme une avancée "historique".
Ces derniers ont toutefois échoué à s'engager à travailler à l'instauration d'un taux minimal d'imposition sur les milliardaires à l'échelle de la planète, une initiative poussée par le Brésil et soutenue notamment par la France mais au sujet de laquelle les Etats-Unis se sont opposés. "C'est quelque chose de très important", a ajouté l'économiste Thomas Piketty mardi, à l'origine de la création du WIL au sein de l'Ecole d'économie de Paris, en commentant les engagements du G20.
Selon l'ONG Oxfam, la part de la richesse totale que les 1% les plus fortunés contrôlent parmi les pays du G20 est passée sur les deux dernières décennies de 26% à 31%, quand la moitié la plus pauvre de la population a vu la sienne passer de 6% à moins de 5%. Imposer davantage les plus fortunés apparaît aussi comme une source de financement potentielle à l'heure où les déficits de beaucoup de pays dérapent et où les besoins pour l'adaptation au changement climatique augmentent.
"D'énormes disparités"
Moins gravement que les inégalités de richesse, les inégalités de revenus sur la planète se sont fortement accrues ces dernières décennies, ont affirmé mardi les économistes du WIL: "le monde s'est enrichi mais cela masque d'énormes disparités entre les régions", ont-ils écrit dans les conclusions de leurs travaux. D'après le Fonds monétaire international, le PIB mondial devrait atteindre 110.000 milliards de dollars cette année, un niveau jamais atteint auparavant et qui devrait continuer à croître tout au long de la décennie.
Le revenu national moyen par habitant s'élevait quant à lui en 2023 à environ 12.800 euros par an, soit 1.065 euros par mois, estime le WIL. "Ce chiffre cache toutefois d'énormes disparités entre les régions. Par exemple, le revenu moyen en Afrique subsaharienne n'était que de 240 euros par mois, contre plus de 3.500 euros en Amérique du Nord et en Océanie, soit une différence de 1 à 15", a-t-il observé.
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Outre les disparités entre régions géographiques, les inégalités de revenus à l'intérieur des pays demeurent très élevées et en augmentation depuis les années 1980, et les 50% les plus pauvres ont des revenus inférieurs aux 10% les plus riches dans l'ensemble des régions du monde, souligne le WIL. Dans certains pays la situation est particulièrement prononcée à l'instar de l'Afrique du Sud, du Mexique, du Brésil ou de l'Inde où 10% de la population capte environ 60% des revenus nationaux.
Les Etats-Unis font figure de grand champion des inégalités de revenus parmi les pays développés avec 1% de la population captant 21% du revenu national, montrent également les statistiques du WIL. L'arrivée de Donald Trump "est susceptible d'augmenter les inégalités", a constaté Matthew Fisher-Post, économiste chargé de l'Amérique du Nord au WIL, mettant en avant le projet du milliardaire américain d'abaisser la taxation sur les entreprises et les ménages les plus fortunés.