Ce ne sont que quelques secondes d'images prises de loin lors de la première rencontre entre Donald Trump et Barack Obama à la Maison Blanche, mais elles en disent long sur la place que s'est faite le très télégénique Jared, 35 ans, mari d'Ivanka et promoteur immobilier comme son beau-père: on le voit marcher dans les jardins de la Maison Blanche, aux côtés du chef de cabinet de Barack Obama, Denis McDonough.
Kushner n'a d'autre titre que de figurer, avec les trois enfants Trump, dans l'équipe de transition qui prépare l'arrivée à Washington du nouveau président.
Mais c'est lui, selon les médias américains, qui a oeuvré en coulisses pour éloigner de Trump l'un de ses proches conseillers, le gouverneur républicain du New Jersey Chris Christie, et deux personnes de son cercle.
Tout cela parce que Christie, qui fut longtemps procureur général du New Jersey, fit emprisonner le père de Jared - longtemps très influent dans le New Jersey et grand contributeur aux campagnes démocrates - pour fraude fiscale et subornation de témoins. Une descente aux enfers qui marqua le jeune homme, alors fraîchement diplômé de Harvard et étudiant en MBA à la New York University, selon le New Yorker.
- Nouveau Raspoutine ? -
Kushner serait-il alors un nouveau "Raspoutine", du nom de l'éminence grise du tsar Nicolas II, comme le suggère Vanity Fair?
Pour Jeanne Zaino, professeur de sciences politiques au Iona College de New York, Jared Kushner a en tout cas réussi, par sa loyauté et "en travaillant dur pendant la campagne", à gagner la confiance de son beau-père, même s'il reste avant tout un homme de l'ombre.
Contrairement à sa femme Ivanka, "il ne s'exprime jamais publiquement, on ne le voit pas sur les réseaux sociaux. On a l'impression qu'il est bien plus à l'aise à travailler en coulisses", dit-elle.
C'est Kushner qui aurait écrit certains discours-clé du candidat Donald Trump; lui aussi qui aurait poussé au départ de son premier directeur de campagne Corey Lewandowski en juin 2016.
Selon une enquête du magazine BusinessWeek, Jared Kushner, qui a racheté il y a 10 ans l'alors-très élitiste journal The New York Observer, a aussi joué un rôle-clé dans la promotion de la campagne de Trump sur les réseaux sociaux, qui a permis de contourner l'hostilité des grands médias.
Après avoir renfloué les comptes du New York Observer en poussant le journal dans l'ère numérique, il aurait recruté un spécialiste texan du marketing sur le Net, Brad Parscale qui, avec son équipe, aurait réussi non seulement à mobiliser les fans de Trump mais aussi à décourager des électeurs potentiels d'Hillary Clinton.
Kushner a par ailleurs en commun avec Donald Trump d'avoir transformé la prospère entreprise immobilière familiale en investissant à Manhattan.
- Projet de télévision -
Sa loyauté à Trump est d'autant plus remarquable qu'il est issu d'une famille juive orthodoxe proche des démocrates.
En juillet, un tweet aux relents antisémites montrant Hillary Clinton sur fond de billet de banque et d'une étoile à six branches, repris par des sites néo-nazis, alarme la communauté juive.
Certains de ses amis se demandent alors s'il ne va pas rompre avec la campagne, lui qui a toujours vécu dans la tradition et avait interrompu une première liaison avec Ivanka parce qu'elle n'était pas juive (elle s'est finalement convertie au judaïsme).
Mais Jared monte au créneau pour son beau-père, et publie dans le New York Observer un éditorial évoquant sa famille rescapée de l'Holocauste pour assurer que Donald Trump n'est "ni antisémite, ni raciste".
Que fera Kushner de son ascension fulgurante dans le monde politique? Dès sa nomination à l'investiture républicaine en juillet, Trump soulignait qu'il aimait "la politique plus que l'immobilier".
Le président élu aurait demandé à ce qu'il puisse assister aux briefings de sécurité quotidiens auxquels il est associé désormais, selon les médias américains - ce que Trump a démenti.
Jared pourrait aussi être tenté de faire sa marque dans les médias. Devenu ami du magnat australien Rupert Murdoch après l'acquisition du New York Observer, il caressait avant l'élection l'idée de lancer une télévision. Ce qui "reviendrait à établir une télévision d'Etat", ironisait le Washington Post.
Avec AFP