Dévaluation de la livre syrienne face au dollar américain

Un vendeur de vêtements à Alep, en Syrie, le 24 mars 2013. (REUTERS/Giath Taha)

Les autorités syriennes ont décidé d'injecter des millions de dollars sur le marché afin d'enrayer la chute de la livre face au billet vert

Le dollar a bondi de 513 à 620 livres syriennes (LS) au taux officiel entre lundi et mardi, suivant ainsi le cours du marché noir et atteignant son taux le plus haut depuis le début de la guerre il y a cinq ans.

Pour contrer cette dégringolade de la monnaie nationale, la banque centrale a annoncé mardi qu'elle obligeait "les bureaux de change à vendre sans commission le dollar à 620 livres syriennes".

Les grands bureaux de change devront acheter à la banque centrale un million de dollars et les plus petits 100.000 dollars pour les céder ensuite. "Ceux qui ne respecteront pas ces consignes seront fermés", ajoute la banque centrale.

Cette dernière organise régulièrement des ventes aux enchères de dollars aux agents de change.

"La forte poussée du dollar s'explique en partie par la rumeur qu'elle n'allait plus le faire faute de devises. La mesure prise va calmer les choses momentanément mais le dollar remontera si la banque centrale n'arrose pas régulièrement le marché en billets verts", a expliqué à l'AFP Jihad Yazigi, directeur de The Syria Report, l'hebdomadaire économique en ligne spécialisé sur la Syrie.

"Il s'agit de l'injection de quelques millions de dollars seulement car il n'existe que cinq gros bureaux de change et une dizaine de petits à Damas", a-t-il ajouté.

Le 20 avril, la Banque mondiale avait annoncé que les réserves en devises de la Banque centrale syriennes avaient fondu de 20 milliards de dollars avant la guerre à 700 millions aujourd'hui.

- 'Terminer la guerre' -

En cinq ans, la monnaie nationale a perdu 92% de sa valeur par rapport au billet vert qui s'échangeait en 2010 à 48 LS, ce qui exaspère la population.

Sur sa page Facebook, Damas Maintenant, un compte pro-régime, s'en prend vivement au gouverneur de la banque centrale, Adib Mayaleh, accusé de "fuir la réalité face à la crise". "Soit tu es capable d'assumer tes responsabilités, soit tu démissionnes", lui lance l'un des rédacteurs, Wissam Tayer.

Un lecteur opine en déclarant que "Mayaleh brise la livre" et qu’il "doit rendre des comptes sinon c'en est fini de notre monnaie".

Un autre internaute, en revanche, prend sa défense. "Si Adib Mayaleh était la cause de la chute de la livre syrienne, le problème serait facile à résoudre. Mais c'est oublier que nous sommes en guerre, que nous subissons un embargo économique et que toutes les sources de devises se sont taries, que ce soit le tourisme ou les exportations". "La seule solution c'est de terminer la guerre", avance-t-il.

Pour de nombreux commerçants et industriels, cette dégringolade accélérée est catastrophique. "Les clients ont cessé d'acheter des produits chez moi car ils préfèrent acheter des produits alimentaires", indique à l'AFP un marchand de produits d'entretien.

Un industriel de la région de Damas a fermé temporairement son usine. "Entre le moment où j'achète à l'étranger les matériaux nécessaires à la fabrication du produit et le moment où je le vends, la livre perd de sa valeur et comme il est interdit de vendre en dollar, je suis perdant", témoigne-t-il.

Avec AFP