Une centaine de manifestants ont été interpellés par la police qui a procédé à des tirs à balle réelle dans certains quartiers, selon l'opposition.
Au moins dix-huit partis d'opposition, réunis sous la bannière de l'Initiative nationale pour une réforme électorale (Nera), et une flopée de mouvements issus de la société civile avaient appelé à défiler dans la plupart des villes du pays, dont Harare.
Mais l'interdiction de manifester et la forte présence de la police ont empêché les manifestants de se réunir et seuls de petits groupes de militants ont réussi à protester dans les banlieues de la capitale.
Le principal parti d'opposition, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC), qui fait partie de la Nera, a annoncé que les manifestants avaient subi des intimidations pour les empêcher de manifester. "Les gens ont été menacés par des policiers et des gens en civil. On leur a dit: +On va vous battre et vous disparaîtrez si vous commencez à manifester+", a déclaré le porte-parole du MDC, Obert Gutu.
"La réponse du gouvernement a été inquiétante. les policiers ont usé de tirs à balle réelle dans des banlieues comme Kuwadzana,Dzirasekwa, Mufakose et Kambuzuma", a déclaré à la presse Jacob Ngarivhume, dont le parti Transform Zimbabwe est membre de la Nera. "Au moins 100 personnes ont été arrêtées".
En revanche, près de mille opposants à Mugabe ont pu manifester pacifiquement samedi dans Bulawayo, deuxième ville du Zimbabwe.
Le pays est dirigé d'une main de fer depuis 1980 par le héros de l'indépendance. Les derniers rassemblements anti-Mugabe ont été réprimés par la police à coups de gaz lacrymogène.
Un décret, publié vendredi dans le quotidien d'Etat, The Herald, et signé par le grand patron de la police zimbabwéenne, Newbert Saunyama, avait prohibé tout rassemblement à Harare du 16 septembre au 15 octobre. Cette décision vise à "empêcher tout désordre public".
En dépit de cette interdiction, les adversaires du gouvernement avaient maintenu leur appel à manifester et annoncé avoir saisi la justice pour en obtenir l'annulation.
La semaine dernière, la justice avait déjà annulé une précédente mesure qui prohibait tout rassemblement à Harare.
"La Constitution et la Haute Cour garantissent la liberté de manifester pacifiquement", a affirmé Promise Mkwananzi, un porte-parole du mouvement #Tajamuka ("Nous sommes agités") à la pointe de la fronde des dernières semaines.
"La police ne fait que promouvoir l'illégalité dans le pays en interdisant des manifestations pacifiques", a-t-il estimé.
Mugabe menace
Depuis plusieurs semaines, le Zimbabwe est agité par une fronde populaire contre le régime du président Mugabe, qui a une nouvelle fois mis en garde les manifestants.
"Que les partis d'opposition et tous ceux qui font le choix du chaos, du désordre et des manifestations violentes soient prévenus que notre patience a des limites", a-t-il lancé, menaçant, la semaine dernière.
L'opposition réclame notamment des réformes en vue des élections générales de 2018, alors que les précédents scrutins ont été entachés de nombreuses fraudes.
En dépit de son âge, 92 ans, Robert Mugabe, compte se représenter à la présidentielle.
La vague de protestation actuelle se nourrit largement de la grave crise économique que traverse le pays depuis le début des années 2000, marquée par un chômage de masse.
Asphyxié financièrement, le gouvernement éprouve de plus en plus de difficultés à payer régulièrement ses fonctionnaires.
Jeudi, il a décidé de lancer des "billets d'obligation", une monnaie locale qui doit se substituer au dollar américain dont le pays manque cruellement.
Cette mesure, attendue de longue date, cristallise la colère des frondeurs et nourrit l'inquiétude des milieux financiers et de la population, qui redoutent le retour aux années d'hyperinflation qui ont ruiné l'économie dans les années 2000.
Avec AFP