Nommé en août par le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres qui l'a chargé de relancer les négociations entre Rabat et les indépendantistes du Front Polisario, M. Koehler a entamé sa tournée lundi au Maroc, qui contrôle depuis 1975 une grande partie de cette ex-colonie espagnole.
Soutenu par l'Algérie, le Polisario a proclamé en 1976 une République arabe sahraouie démocratique (RASD) et réclame la tenue d'un référendum d'autodétermination, prévu par l'ONU.
Après 15 ans de conflit, Rabat et le Polisario ont signé un cessez-le-feu en 1991, mais le référendum d'autodétermination est sans cesse repoussé depuis 1992 en raison de désaccords sur le corps électoral. Depuis 2007, Rabat propose comme solution de "compromis" une autonomie sous sa souveraineté, ce que refuse le Polisario.
Les autorités marocaines ont érigé dans les années 1980 un "mur de défense", long de 2.700 km, qui coupe l'ex-colonie du nord au sud, séparant les territoires sous contrôle marocains de ceux (environ 20%) contrôlés par le Front Polisario.
M. Koehler a été accueilli en fin de matinée par des responsables du Polisario au camp d'Aousserd, l'un des camps de réfugiés situés autour de Tindouf (1.800 km au sud-ouest d'Alger) et dans lesquels vivent entre 100.000 et 200.000 réfugiés sahraouis, les chiffres variant selon les sources en l'absence de tout recensement officiel.
"Je suis venu écouter les deux parties au conflit, constater de visu les conditions dans les camps de réfugiés et comprendre la question davantage et surtout constituer ma vision personnelle", a expliqué M. Koehler lors d'une brève déclaration devant la presse.
Il a fait part de son optimisme "quant à l'avenir des négociations du plan de règlement du conflit du Sahara occidental établi par l'ONU". "Je ne suis pas magicien", a-t-il toutefois souligné.
M. Koehler a rencontré la population, notamment des groupes de femmes. Dans l'après-midi, des entretiens à huis clos étaient prévus avec les responsables du Polisario dans un autre camp, celui de Raboune, siège de l'administration de la RASD.
'Nouvelle dynamique'?
M. Koehler - qui ne s'est pas rendu officiellement dans les territoires du Sahara sous contrôle marocain - doit rendre visite jeudi à Tindouf aux Casques bleus de la Minurso, notamment chargés de surveiller le cessez-le-feu.
Vaste étendue désertique de 266.000 km2 bordant la côte Atlantique au nord de la Mauritanie, le Sahara occidental est le seul territoire du continent africain dont le statut post-colonial n'a pas été réglé.
Après des années d'impasse, M. Guterres a affirmé en avril vouloir impulser une "nouvelle dynamique" autour de ce conflit qui empoisonne depuis des décennies les relations entre Alger et Rabat et entrave plus largement la coopération maghrébine.
Dans la foulée, le Conseil de sécurité a adopté une résolution de soutien à une reprise des négociations et prolongé jusqu'à la fin avril 2018 le mandat de la Minurso.
Le prédécesseur de Horst Koehler, le diplomate américain Christopher Ross, était très critiqué par le Maroc qui mettait en cause son impartialité. Il a démissionné de son poste d'émissaire onusien en mai, après huit ans d'efforts infructueux.
Au cours de son séjour marocain, effectué dans une grande discrétion, M. Koehler, ex-président allemand, a rencontré mardi le roi Mohammed VI, mais rien n'a filtré de leurs entretiens.
"La +qualité+ de son accueil (à Rabat), avec un blackout médiatique, est une preuve que le Maroc campe sur ses positions et sera un obstacle aux efforts" de M. Koehler, a averti mardi soir à Tindouf, Ahmed Boukhari, représentant du Polisario auprès de l'ONU.
Selon M. Boukhari, le mandat de Horst Koehler va être entravé "par le manque de volonté politique de la part du royaume marocain et sa tentative" de maintenir "le statu quo" et par "la position au sein du Conseil de sécurité" de l'ONU de la France, dont le "soutien" au Maroc pousse, selon lui, Rabat à "l'intransigeance".
M. Koehler doit se rendre à partir de vendredi à Alger et Nouakchott, mais son programme détaillé n'a pas été publié.
Avec AFP