La mouvance islamiste est actuellement éclatée en de multiples formations affaiblies par les luttes de camp et incapables d'imposer ses idées.
"Leurcourant a été laminé, comme l'a été le courant démocratique" depuis l'arrivée au pouvoir du président Abdelaziz Bouteflika en 1999, souligne le politologue Rachid Grine.
Lors des dernières législatives en mai 2012, les islamistes, qui espéraient surfer sur les victoires de leur mouvance dans les pays du Printemps arabe, avaient enregistré leur plus mauvais score depuis le premier scrutin pluraliste de 1990. Ils espèrent remonter la pente à l'occasion du scrutin d'avril qui se tiendra dans un contexte économique et social rendu délicat du fait de la chute des recettes pétrolières.
En cas d'union et "si les élections sont honnêtes, les islamistes seront sur le podium et feront partie des gagnants aux prochaines législatives", affirme M. Grine.
Rachid Tlemçani, un autre expert politique, prédit plutôt que la mouvance islamiste, dont il relève la "fébrilité", va "certainement" réunir des voix mais qu'elle "n'aura que son petit quota".
'L'union, une nécessité'
En décembre 2016, trois partis islamistes ont décidé d'établir "une alliance stratégique unitaire" en vue des législatives comme première étape vers une fusion d'ici la fin de 2017. Il s'agit d'El Binaa, du Front pour la justice et le développement (FJD) d'Abdallah Djaballah et du mouvement Ennahda que ce même Djaballah avait créé dans les années 1990 avant d'en être écarté.
Parallèlement, deux autres formations, le Mouvement de la société pour la paix (MSP) et le Front du changement (FC), parti dissident du premier, ont annoncé début janvier leur prochaine fusion.
"L'union est une nécessité", a affirmé M. Djaballah à l'AFP, en précisant que ces manoeuvres de rapprochement étaient plus profondes qu'un simple accord électoral.
"Nous allons rencontrer le MSP prochainement et voir ce que nous pourrons faire ensemble", a précisé M. Djaballah. Cette réunion pourrait décider d'une éventuelle alliance pour les législatives, selon des observateurs.
Abderazak Mokri, souvent présenté comme le chef de file des islamistes, affirme qu'il y a "un développement très important au sein de cette obédience" afin de "sortir de l'effritement" politique. L'objectif est de ramener, dans un mois ou deux, le nombre de partis islamistes de six à deux, selon lui.
Pour M. Tlemçani, leurs chefs de file "ont pris conscience que l'islamisme politique a, dans ses diverses tendances, terriblement régressé". "Ils ne pensent pas remporter un grand succès aux législatives, alors ils essayent de se regrouper pour faire force commune", analyse le politologue.
Participer pour exister
Les islamistes sont d'accord pour ne pas mettre en cause leur participation aux législatives, qu'a prévu de boycotter le parti d'Ali Benflis, candidat malheureux face M. Bouteflika en 2014.
"Nous n'optons pas pour la rue pour le moment car nous voulons préserver l'équilibre et sauvegarder la stabilité et la sécurité du pays", explique M. Mokri. Il estime cependant que le temps est compté pour le gouvernement, qui devra tôt ou tard rendre des comptes à la population en raison de la situation économique et sociale.
En attendant, "nous refusons de jeter de l'huile sur le feu car nous voulons qu'il y ait une transition politique dans la paix", précise M. Mokri.
Il refuse "la politique de la chaise vide" même si, selon lui, la fraude électorale cible en particulier son parti qui dispose "de candidats partout en Algérie face au Front de libération nationale (FLN, ex-parti unique) et au Rassemblement national démocratique (RND)".
Ces deux partis disposent de la majorité absolue dans l'actuel Parlement après avoir devancé, aux élections de 2012, les islamistes regroupés au sein de l'Alliance de l'Algérie verte dans laquelle figuraient le MSP qui venait de quitter le gouvernement, Ennahda (Renaissance) et El Islah (Reforme).
Après ce revers, les principaux partis islamistes n'avaient pas présenté, pour la première fois, de candidat à la présidentielle de 2014, à l'issue de laquelle M. Bouteflika avait été réélu pour la quatrième fois.
Auparavant, l'unique victoire islamiste avait été celle du Front islamique du Salut (FIS) qui avait raflé la majorité des communes en juin 1990. Quelques mois plus tard, au 1er tour des législatives de 1991, le FIS était arrivé largement en tête, mais l'annulation des résultats par le pouvoir et la riposte de ce parti, dont des militants prirent les armes, entraînèrent le pays dans une guerre civile qui fit autour de 200.000 morts.
Avec AFP