Le chef du gouvernement français, qui effectue son premier déplacement à l'étranger depuis sa nomination le 6 décembre, a opté pour une région au coeur des enjeux sécuritaires de la France et de l'Europe, avec ses multiples foyers jihadistes.
"Cela lui tenait à coeur de rencontrer des soldats français qui luttent contre le terrorisme à des milliers de kilomètres de chez eux", ont indiqué les services du Premier ministre, déjà très impliqué dans le contre-terrorisme lors de ses précédentes fonctions au ministère de l'Intérieur.
La force française Barkhane, dont il doit visiter le QG à N'djamena, mobilise près de 4.000 hommes dans cinq pays du Sahel (Mali, Tchad, Niger, Burkina Faso et Mauritanie).
Elle a pris la suite de l'opération Serval, qui a mis en déroute en 2013 les islamistes armés ayant conquis une grande partie du nord du Mali, sans toutefois anéantir la menace.
Les forces maliennes, françaises et de l'ONU (Minusma) restent régulièrement visées par des attaques meurtrières dans le nord. Depuis 2015, ces attaques se sont en outre étendues à d'autres régions du pays.
Quatre soldats français ont été tués au Mali en 2016. Une humanitaire française, Sophie Pétronin, a également été enlevée samedi à Gao (nord) où Barkhane concentre pourtant le gros de ses moyens au Mali (près d'un millier de soldats stationnés).
Bernard Cazeneuve, accompagné du ministre de la Défense Jean-Yves Drian, va aussi rencontrer le président Déby, en première ligne dans la lutte contre le groupe islamiste nigérian Boko Haram dans le bassin du lac Tchad et contre les jihadistes au Mali.
Il entend "exprimer le soutien de la France aux autorités tchadiennes qui connaissent une crise économique et financière assez brutale", précise-t-on à Matignon.
Allié stratégique de l'Occident dans la lutte contre les jihadistes, à la frontière entre Afrique du nord et Afrique noire, le Tchad se débat dans une crise profonde qui secoue le régime autoritaire d'Idriss Déby, au pouvoir depuis 1990.
Soutien militaire et financier
Ce pays pauvre de 12 millions d'habitants pâtit de la chute des recettes liées au pétrole, qui plombent son économie et ses finances, au moment où il est engagé dans de coûteuses opérations contre Boko Haram.
L'opposition politique, qui conteste la réélection en avril du président qu'elle accuse de "hold-up électoral", surfe sur un contexte social explosif, ponctué de manifestations, grèves et arrestations de militants.
Le président tchadien, qui assistait à un sommet africain en marge de la COP22 en novembre à Marrakech, a ainsi dû revenir précipitamment à N'djamena alors que son gouvernement était menacé d'une motion de censure.
Militaire formé en France, président en exercice de l'Union africaine, Idriss Déby est en revanche soutenu par Paris et Washington, qui ont besoin de son armée dans la région.
La France a accordé une aide budgétaire de cinq millions d'euros ainsi qu'un soutien humanitaire d'urgence de trois millions d'euros au Tchad en 2016, précise-t-on à Matignon. Elle soutient aussi l'armée tchadienne, une des plus solides de la région, en lui fournissant renseignement, appui logistique et matériels.
N'djamena participe activement à la lutte contre le groupe nigérian Boko Haram, notamment à la frontière entre le Tchad et le Niger. S'il paraît très affaibli militairement, le groupe garde toutefois un important pouvoir de nuisance à coups d'attaques-suicide.
Les soldats tchadiens sont aussi intervenus aux côtés de l'armée française en 2013 au Mali et ont payé un lourd tribut depuis au sein de la Minusma dont ils constituent un des piliers.
Avec AFP