Au terme d'une séance électrique, le Congrès national africain (ANC) de M. Zuma, qui dispose d'une confortable majorité absolue parmi les députés, a fait barrage au texte visant son chef, rejeté par 214 voix contre 126.
A la tribune du Parlement, le chef de l'Alliance démocratique (DA, centre droit) a ouvert les débats en lançant une violente diatribe contre le président, au pouvoir depuis 2009.
"Aujourd'hui, nous pouvons choisir la corruption ou nous pouvons choisir l'avenir de ce pays (...) Nous pouvons choisir de laisser un homme s'enrichir ou aider des millions de gens à se libérer de la pauvreté", a déclaré Mmusi Maimane.
Le texte rejeté jeudi a pour origine la publication la semaine dernière d'un rapport de la médiatrice de la République, qui a illustré par le menu l'influence exercée sur le gouvernement par la richissime famille Gupta, avec la complicité du président.
Entre autres exemples, ce document affirme que les Gupta ont offert un pot-de-vin de 40 millions d'euros au vice-ministre des Finances Mcebisi Jonas, qu'il assure avoir refusé.
"Ce que nous vivons en ce moment en Afrique du Sud, c'est un désastre post-colonial qui s'appelle M. Jacob Zuma", a lancé jeudi un député des Combattants pour la liberté économique (EFF, gauche radicale), Floyd Shivambu.
Très virulent, il n'a pas hésité à comparer M. Zuma à d'autres autocrates africains célèbres comme Joseph Mobutu (RD Congo) ou Idi Amin Dada (Ouganda).
L'ANC a rejeté ces accusations par la voix de la ministre de l'Eau Nomvula Mokonyane, qui a accusé l'opposition de vouloir "distraire l'ANC (...) de sa tâche de relever les défis de la pauvreté, le chômage et l'inégalité".
Litanie des affaires
"Cette motion recourt à un visage noir (celui de M. Maimane, ndlr) pour protéger l'intérêt de la minorité blanche", a-t-elle poursuivi.
Le rapport publié la semaine dernière vient s'ajouter à la longue liste des affaires qui ont défrayé la chronique de la présidence Zuma, à commencer par celle des travaux effectués avec de l'argent public dans sa résidence privée qui l'a contraint à rembourser 500.000 euros.
Plus de vingt ans après l'entrée en fonction du premier gouvernement post-apartheid en 1994, cette litanie suscite de plus en plus de colère dans la jeune démocratie "arc-en-ciel".
Depuis le revers subi aux élections locales d'août, la révolte a gagné les rangs du parti au pouvoir.
En octobre, le président de son groupe parlementaire, Jackson Mthembu, a exprimé son ras-le-bol et appelé M. Zuma à démissionner. Et les vétérans de la lutte contre l'apartheid ne se privent plus de le critiquer publiquement.
Le parti est "plus divisé que jamais sur la présidence Zuma", a indiqué à l'AFP Loammi Wolf, spécialiste en droit constitutionnel.
Dans son discours, le leader de la DA a incité jeudi les frondeurs à concrétiser leur colère en sanctionnant le président. "Je sais qu'il y a des hommes et des femmes sur ces bancs de l'ANC qui veulent faire ce qui est bien", a lancé M. Maimane.
Mais le chef de l'Etat garde encore, pour l'instant, le soutien de sa majorité. "Les personnes clé de l'ANC sont très favorables à Zuma", a confirmé à l'AFP Patrick Bond, professeur d'économie politique à l'université du Witwatersrand à Johannesburg.
Pour éviter d'étaler ses divergences, l'ANC a refusé jeudi le vote à bulletin secret demandé par l'opposition.
Le mandat de Jacob Zuma à la tête du pays s'achève en 2019. Mais dès fin 2017, l'ANC élira un nouveau président pour le parti et pourrait décider, dès ce moment-là, de le remplacer à la tête de l'Etat, pronostiquent déjà plusieurs analystes.
Avec AFP