Khartoum suspend ses discussions avec Washington sur les sanctions américaines

Le président Omar el-Béchir du Soudan, 2 mars 2017.

Le Soudan a annoncé mercredi, suite à la prolongation par Washington des sanctions économiques imposées à Khartoum, suspendre les discussions avec les Etats-Unis à ce sujet.

Le président américain Donald Trump a prolongé jusqu'au 12 octobre la période probatoire décidée à l'origine pour six mois par son prédécesseur Barack Obama, avant une éventuelle levée totale de cet embargo vieux de 20 ans.

Pour obtenir cette levée, Khartoum devait répondre à une feuille de route en "cinq points".

Parmi ces conditions figurent la fin du soutien aux groupes rebelles au Soudan du Sud, la fin des hostilités dans les provinces du Darfour, du Nil-Bleu et du Kordofan-Sud et une coopération avec le renseignement américain contre le terrorisme.

Mais l'administration américaine a expliqué mardi "avoir besoin de plus de temps pour cette période probatoire", tout en reconnaissant "que le gouvernement du Soudan a fait des progrès importants dans beaucoup de secteurs".

Le Soudan, qui avait nourri de grands espoirs quant à cette éventuelle levée, n'a pas tardé à réagir. Le président Omar el-Béchir a publié un décret "ordonnant la suspension du comité qui négociait avec les Etats-Unis", selon l'agence de presse officielle Suna.

Ce comité négociait depuis plus d'un an avec des responsables américains pour tenter d'obtenir la suppression de ces sanctions, en vigueur depuis 1997.

Réagissant peu après la réaction de M. Béchir, un haut-responsable de l'administration américaine a affirmé à des journalistes à Washington que les Etats-Unis tenaient à conserver "une relation positive" avec le Soudan.

- 'Regrets' -

Plus tôt mercredi, le ministre soudanais des Affaires étrangères Ibrahim Ghandour a dit "regretter" la décision américaine "qui intervient après de longues négociations entre le Soudan et les Etats-Unis".

"Les Etats-Unis, l'Europe, l'Afrique et la communauté internationale admettent que le Soudan a tenu ses engagements (...), c'est pourquoi nous ne voyons aucune raison d'étendre la période probatoire".

"Mais nous espérons toujours que les sanctions seront levées définitivement", a-t-il ajouté.

En juin, l'émissaire américain pour le Soudan avait salué auprès de l'AFP les "avancées positives" de Khartoum sur les cinq points, "mises à part quelques exceptions".

Mais l'administration américaine a "décidé que davantage de temps était nécessaire pour établir que le gouvernement soudanais a (effectivement) démontré les progrès nécessaires sur tous les secteurs", a indiqué le décret de Donald Trump, tout en reconnaissant "que le gouvernement du Soudan a fait des progrès importants".

Les sanctions économiques contre le Soudan avaient été imposées en 1997 pour son soutien présumé aux islamistes dont le chef d'Al-Qaïda Oussama Ben Laden, tué dans un raid américain au Pakistan en mai 2011.

Washington justifiait également ces mesures en accusant Khartoum d'avoir recours à la politique de la terre brûlée contre une minorité ethnique rebelle au Darfour, province de l'ouest du Soudan en proie à un conflit meurtrier depuis 2003. Cette guerre a fait plus de 300.000 morts et 2,5 millions de déplacés, selon l'ONU.

M. Béchir lui-même est poursuivi par la Cour pénale internationale pour génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre, des accusations qu'il rejette.

Donald Trump avait jusqu'à mercredi trois choix à sa disposition: lever définitivement les sanctions, prolonger la période probatoire ou faire machine arrière en rétablissant complètement l'embargo.

Les Nations unies avaient dit espérer que les Etats-Unis annonceraient une "décision positive" en faisant état d'une "amélioration notable" dans l'accès humanitaire à des zones de conflit ces six derniers mois.

Même si les relations américano-soudanaises se sont sensiblement améliorées, le département d'Etat maintient Khartoum depuis 1993 sur sa liste noire des "Etats soutenant le terrorisme", au même titre que l'Iran et la Syrie.

Avec AFP