Un quotidien indépendant suspendu pour deux ans en Tanzanie

La Une du site de Mwanahalisi, en Tanzanie, le 19 septembre 2017.

Le quotidien tanzanien indépendant Mwanahalisi a été suspendu pour une durée de deux ans, a annoncé mardi le gouvernement, accusant la publication d'inciter dans ses articles à la "sédition" et de mettre en péril "la sécurité de la nation".

Après avoir été averti à plusieurs reprises, le journal a été suspendu après la publication lundi d'un courrier de lecteur relayant "diverses insultes circulant sur internet contre le président et le gouvernement", a assuré Hassan Abbasi, principal porte-parole du gouvernement, dans un communiqué.

Le président John Magufuli "prétend être un patriote et met en cause le patriotisme de quiconque s'oppose à lui, c'est hypocrite", accuse notamment le courrier publié dans Mwanahalisi, déjà suspendu plusieurs fois par le passé, notamment entre 2012 et 2015.

Tournant en dérision l'appel régulier de M. Magufuli à prier pour lui, le billet interroge en outre s'il faut "prier" pour le président ou pour l'opposant Tundu Lissu, grièvement blessé lors d'une fusillade devant son domicile à Dodoma le 7 septembre, une attaque que l'opposition impute au gouvernement.

Selon le porte-parole du gouvernement, la publication de lundi est la dernière en date d'une série de violations de "l'éthique, des principes de la profession journalistique par la publication d'articles mensongers, séditieux et mettant en danger la sécurité de la nation".

En conséquence, "le gouvernement suspend l'impression et la diffusion du quotidien Mwanahalisi pour une durée de 24 mois à compter d'aujourd'hui", a indiqué M. Abbasi.

Surnommé "Tingatinga" (bulldozer en swahili), le président Magufuli a marqué les esprits depuis sa prise de fonctions fin 2015 en se montrant inflexible dans la lutte contre la corruption. Mais son style peu consensuel et abrupt lui vaut d'être qualifié d'autocrate et de populiste par ses détracteurs, alors que la liberté d'expression est de plus en plus réduite.

En juin, les autorités tanzaniennes avaient suspendu pour deux ans un hebdomadaire ayant relayé des accusations liant deux anciens présidents à des contrats miniers controversés.

Mwanahalisi avait été interdit de publication entre 2012 et 2015 pour "sédition" et diffusion d'informations mensongères après avoir accusé les services de sécurité d'être impliqués dans l'agression d'un dirigeant du syndicat des médecins, alors en grève.

En octobre 2008, Mwanahalisi avait déjà été suspendu trois mois, après avoir été la cible d'une perquisition de ses bureaux et du domicile de son rédacteur en chef. Et en janvier de la même année, son directeur de la publication et son rédacteur en chef adjoint avaient été attaqués à l'acide dans les locaux de la rédaction.

Avec AFP