Virus: l'épidémie dépasse l'ampleur du Sras, vols suspendus vers la Chine

Arrivée de passagers évacués de Wuhan en Chine à Riverside, en Californie, le 29 janvier 2020.

Deux compagnies aériennes ont suspendu mercredi leurs vols vers la Chine continentale, où l'épidémie de pneumonie virale a déjà fait plus de malades que le Sras, tandis que plusieurs centaines de ressortissants japonais et américains étaient évacués de Wuhan, berceau du virus.

Vingt-six décès supplémentaires dus au nouveau coronavirus ont été enregistrés depuis la veille, ont indiqué mercredi les autorités sanitaires, faisant état au total de 132 morts et 5.974 cas confirmés de contamination en Chine continentale (hors Hong Kong).

Un chiffre qui dépasse désormais le nombre d'infections enregistré lors de l'épidémie de Sras (Syndrome respiratoire aigu sévère) en 2002-2003, un précédent coronavirus qui avait contaminé dans le pays 5.327 personnes. Le Sras avait fait 774 morts dans le monde, dont 349 en Chine continentale.

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Si l'essentiel des contaminations par le nouveau virus a eu lieu en Chine, une quinzaine de pays sont également touchés, les Emirats arabes unis faisant état mercredi du premier cas avéré au Moyen-Orient.

Signe d'un durcissement des mesures de précaution à l'étranger, British Airways a annoncé mercredi la suspension immédiate de tous ses vols vers la Chine continentale.

La compagnie britannique précise suivre la consigne du Royaume-Uni qui, à la suite des Etats-Unis et de l'Allemagne notamment, déconseille à ses ressortissants tout voyage dans le pays.

Dans la foulée, la compagnie indonésienne Lion Air, qui exploite la plus grande flotte d'Asie du Sud-Est, a annoncé faire de même, à partir du 1er février. La compagnie hongkongaise Cathay Pacific, l'américaine United Airlines et Air Canada avaient déjà annoncé leur intention de réduire leur desserte.

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Hong Kong a par ailleurs annoncé fermer six de ses 14 points de passage avec le reste de la Chine.

- Evacuations -

Dans le même temps, le Japon et les Etats-Unis ont été mercredi les premiers pays à engager le rapatriement d'une partie de leurs ressortissants, piégés à Wuhan (centre), où est apparu en décembre le nouveau coronavirus.

Cette ville et la quasi-totalité de la province du Hubei sont coupées du monde depuis le 23 janvier par les autorités dans l'espoir d'endiguer l'épidémie. Ce cordon sanitaire concerne 56 millions d'habitants et quelques milliers d'étrangers.

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Un avion transportant quelque 200 ressortissants nippons s'est posé en début de matinée à Tokyo.

"Nous ne pouvions plus circuler librement (...) Le nombre de malades a commencé à s'envoler rapidement à un certain point, c'était effrayant", a témoigné à son arrivée l'un des rapatriés, Takeo Aoyama, salarié de l'entreprise sidérurgique Nippon Steel.

Faute de cadre légal, les autorités japonaises ne prévoient pas de placer en quarantaine les rapatriés, leur demandant de ne pas quitter leur résidence pendant deux semaines.

Un avion envoyé par les Etats-Unis a également décollé mercredi de Wuhan avec environ 200 personnes à bord, membres du personnel de leur consulat local ainsi que d'autres ressortissants américains.

Près de 600 citoyens européens veulent être rapatriés de Chine face à la propagation du nouveau coronavirus, a annoncé mercredi la Commission européenne, qui recommande à son personnel de ne pas y voyager.

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Paris prévoit de ramener à bord de deux avions au moins 350 Européens, dont 250 Français. Le premier décollera "probablement vendredi". Et Berlin a annoncé l'évacuation de quelque 90 Allemands présents à Wuhan "dans les prochains jours". Les personnes évacuées vers la France et l'Allemagne subiront ensuite une période de quarantaine de 14 jours, conforme au délai d'incubation du virus.

L'Australie, qui réfléchit également à une évacuation, envisage de placer ses ressortissants en quarantaine sur l'Île Christmas, dans l'océan Indien.

Wuhan, où la circulation des véhicules non essentiels est interdite, gardait des allures de ville fantôme. "C'est le premier jour que je sors depuis le début du confinement. Pas d'autre choix: il fallait que j'achète à manger", a déclaré à l'AFP un rare piéton à s'aventurer dans les rues.

Dans le reste de la Chine, où les congés du Nouvel an lunaire ont été prolongés jusqu'au 2 février, la plupart des habitants, effrayés, désertent centres commerciaux, cinémas et restaurants. La chaîne américaine de cafés Starbucks et le géant suédois de l'ameublement Ikea ont annoncé fermer la moitié de leurs commerces.

A l'instar de plusieurs autres compétitions sportives (cyclisme, football, tennis), les épreuves de Coupe de monde de ski alpin prévues en Chine en février ont été annulées.

- "Réponse mondiale" -

Signe alarmant: l'apparition de premiers cas de transmission directe du virus entre humains hors de Chine. Le Japon a dévoilé mardi la contamination d'un sexagénaire qui ne s'était jamais rendu en Chine, tandis que l'Allemagne faisait état de la première transmission directe du virus sur le sol européen.

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La France, de son côté, enregistre son quatrième malade, un touriste originaire du Hubei qui se trouve dans un "état clinique sévère" dans un hôpital parisien.

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a annoncé mardi l'envoi "dès que possible" en Chine d'experts internationaux afin de mettre en commun les connaissances sur le virus et apporter une "réponse mondiale".

"L'épidémie est un démon. Nous ne permettrons pas au démon de se cacher", a assuré le président Xi Jinping.

Les Etats-Unis ont cependant appelé la Chine à "plus de coopération et de transparence". En 2002, le régime chinois avait été accusé d'avoir dissimulé l'apparition du Sras.

Alors que la recherche d'un vaccin - entamée notamment par plusieurs laboratoires et firmes aux Etats-Unis - devrait prendre des mois, des scientifiques de l'Institut Doherty en Australie ont annoncé être parvenus à répliquer en laboratoire le coronavirus, une étape considérée cruciale.

Au-delà du secteur aérien, la crise pourrait assombrir une économie mondiale fragile.

Le géant américain de l'électronique Apple a reconnu des incertitudes sur ses chaînes de production en Chine. De même, le géant automobile japonais Toyota a annoncé mercredi qu'il prolongeait d'une semaine la suspension de la production dans ses trois usines en Chine, jusqu'au 9 février.