La tuerie de Nice, la plus grave attaque terroriste en Europe depuis les attentats de Paris en novembre 2015 et de Bruxelles le 22 mars, a fait 84 morts et plus de 350 blessés, fauchés par un camion lancé contre la foule sur la Promenade des Anglais.
La droite, qui gère la ville, et l'extrême-droite, qui y est très implantée, fustigent depuis lors le gouvernement socialiste, attribuant au ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve la responsabilité des failles présumées du dispositif sécuritaire le soir du carnage.
Le contexte politique est propice à la surenchère, à moins d'un an des élections présidentielle et législatives de 2017.
Dans un entretien au Journal du dimanche (JDD), Sandra Bertin, qui dirige la vidéosurveillance à la police municipale de Nice, s'est dit victime de pressions le 15 juillet d'un commissaire "envoyé" par l'Intérieur, qui l'a "mise en ligne" avec le ministère.
Elle dit alors avoir été "harcelée", sommée de détailler, dans un rapport sur les images de la soirée de la veille, la présence de la police municipale et "de bien préciser que l'on voyait aussi la police nationale sur deux points dans le dispositif de sécurité".
"On m'a ordonné de taper des positions spécifiques de la police nationale que je n'ai pas vues", accuse-t-elle.
Sur la sellette depuis plusieurs jours, Bernard Cazeneuve, à qui le président François Hollande a renouvelé vendredi "toute (sa) confiance", a contre-attaqué en annonçant une plainte pour "diffamation".
Le ministère a démenti toute intervention ou échange avec la responsable niçoise, qu'il a appelée à produire les preuves de ses accusations.
"Les polémiques et manipulations qui portent atteinte à la police nationale, à ses dirigeants et à son ministre doivent cesser", a renchéri le patron de la police nationale, Jean-Marc Falcone.
"Accusations indignes"
Comment le tueur de Nice a-t-il pu lancer son semi-remorque de 19 tonnes sur la foule arpentant la Promenade des Anglais le soir de l'attentat? Les interrogations sur la sécurisation de l'artère ont été nourries par des informations jeudi du journal Libération.
Selon le quotidien de gauche, une seule voiture de police municipale barrait l'accès à la zone piétonne quand Mohamed Lahouaiej Boulhel a engagé le camion dans sa course meurtrière. Elle avait relevé deux heures avant une voiture de la police nationale.
La polémique porte aussi depuis quelques jours sur une demande faite par la justice à la ville de Nice de détruire des copies d'enregistrements de vidéosurveillance durant l'attentat. La municipalité a crié à la "destruction de preuves".
"Le ministère de l'Intérieur donne le sentiment de chercher à empêcher que n'éclate la vérité dans ce qui devient une affaire d'État", a dénoncé dimanche le parti d'extrême droite Front national (FN), jugeant "accablant" le témoignage de Sandra Bertin.
Les propos de la policière municipale sont "un élément de plus qui démontre que quelque chose n'est pas transparent", a renchéri Eric Ciotti, député niçois de droite proche de l'ex-président Nicolas Sarkozy.
"Les accusations indignes de ce jour s'inscrivent dans la suite des polémiques virulentes que certains élus de Nice ont souhaité entretenir puis alimenter", s'est emporté au contraire Bernard Cazeneuve.
Le ministre a implicitement pointé du doigt une manipulation orchestrée par le patron de la droite niçoise et président de la région, Christian Estrosi, l'élu le plus offensif contre le gouvernement, qui a récusé en retour des "accusations scandaleuses d'instrumentalisation".
L'attentat du 14 juillet est un coup dur pour cet ex-maire de Nice, toujours adjoint à la sécurité. M. Estrosi s'est souvent targué d'avoir fait de Nice une des villes les plus sûres de France, grâce au réseau de vidéosurveillance le plus développé du pays.
Avec AFP