Khartoum a présenté ce scrutin de trois jours, qui se termine mercredi, comme le signe d'une stabilité retrouvée dans une région où des insurgés défient le pouvoir central depuis 2003.
Les principaux groupes armés et d'opposition le boycottent car ils le jugent inéquitable en raison des troubles et du nombre important de déplacés, et plusieurs pays étrangers, dont les Etats-Unis, l'ont critiqué.
Et à Zamzam, où vivent 185.000 personnes, savoir si le Darfour doit rester divisé en cinq provinces administratives -l'option soutenue par Khartoum- ou en devenir une seule n'est vraiment pas une priorité.
"Ce référendum ne me concerne pas, je veux juste la paix et la stabilité", explique Ismail Omar, présent sur un petit marché de tabac à mâcher au coeur du camp.
La guerre que se livrent le régime d'Omar el-Béchir et des insurgés d'origine non arabe, qui disent être marginalisés par le pouvoir central, dominé par les Arabes, a fait 300.000 morts et contraint 2,5 milllions de personnes à fuir leurs foyers, selon l'ONU.
C'est le cas de Moussa, qui a tout perdu un an après le début de ce conflit qui vaut à Béchir d'être recherché par la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes contre l'humanité, crimes de guerre et génocide.
"J'étais dans mon village de Kunjara (dans le nord du Darfour) quand les Janjawaeed (miliciens arabes prorégime) ont attaqué nos maisons, les ont brûlées et ont pris notre bétail", raconte cet ancien fermier de 62 ans. Maintenant "je travaille comme négociant sur ce marché de tabac", dit-il avec nostalgie.
Comme lui, de nombreux habitants de Zamzam appartiennent à la myriade de groupes ethniques non arabes du Darfour qui autrefois cultivaient les terres ou élevaient du bétail dans cette région d'environ 500.000 km2 dont le sous-sol recèle d'importantes richesses (pétrole, uranium et cuivre).
Si le gouvernement assure que l'intérêt pour le scrutin est élevé au Darfour, très peu d'électeurs étaient visibles mardi à Zamzam.
Pour eux, la pauvreté et la situation des déplacés internes sont des sujets autrement plus urgents que le statut administratif du Darfour.
Dans les allées autour du marché, des enfants pieds-nus et dépenaillés demandent de l'argent ou de la nourriture aux Casques bleus qui patrouillent quotidiennement dans le camp.
Selon Omar Ashar, qui tente de survivre en faisant du commerce au marché, les conditions ne sont pas encore réunies pour qu'un tel vote se tienne.
Habillé de la robe blanche traditionnelle et la tête enturbannée, cet homme de 62 ans raconte avec des larmes dans les yeux qu'il est arrivé à Zamzam en mars 2003 après la destructions de son village par des milices. "J'ai vu mon fils Hamid Ibrahim et mon neveu Faiçal Tibin se faire tuer sous mes yeux".
Aujourd'hui, les violences se poursuivent au Darfour, à une moindre échelle, et des personnes fuyant les combats continuent d'arriver à Zamzam.
Abdelmajid Abdelrahman s'y est installé en 2012. Lui aussi a tout perdu, maison et bétail, dans l'attaque de son village par des miliciens. "Nous n'avons que faire de cette élection, ce qui nous importe le plus c'est la stabilité".
Avec AFP