La vie a repris ses couleurs à Oicha à une trentaine de kilomètres de Beni ville, mais derrière ce calme relatif se cache un drame, la vie difficile des milliers des déplacés qui y vivent.
"Des villages ont été totalement vidés, et il n'existe pas de sites officiels ouverts par l'État, la situation est grave", alarme Richard Kirimba, 2e vice-président du conseil de la jeunesse de Beni.
À l’école primaire Mwangaza, le constat est amer. Alors que dans les salles de classe, les élèves suivent le cours, dehors, c’est un autre spectacle d’abandon et de désolation qui s’offre aux yeux.
L’insalubrité est perceptible et, aux alentours de l’école, des déplacés visiblement très affamés sont allongés à même le sol le regard vide en attendant que les cours s’arrêtent.
"Ce sont des gens qui ont fui et vivent dans des conditions très précaires", raconte Janvier Kasairo, président territorial des jeunes de Beni.
Personne ne veut s'exprimer sur les conditions de vie. "Ça ne sert à rien car rien ne va changer", "l’humanité nous a tourné le dos", se lamentent-ils.
Parmi les salles de classe transformées en logis de circonstance pour ces déplacés, une salle sert à la fois de chambre, de salon et de cuisine où enfants et adultes sont exposés aux intempéries.
"Ce ne sont pas des sites aménagés, où des personnes de tout âge vivent ensemble. Tous les matins, on leur demande de quitter l'école", confie Richard Kirimba.
Les déplacés étaient 900 ménages dans les écoles au début de la crise, selon le bureau de la société civile de Beni. Au fur et à mesure des interventions d'organisations humanitaires, des déplacés ont abandonné les écoles pour louer des maisons à bas prix dans la cité d’Oicha.
Les déplacés trouvent des travaux à faire.
"Certains font des champs, d'autres creusent des toilettes, beaucoup s'occupent du concassage des noix, et les revendent au marché", explique Désiré kimoto, chargé de la planification au sein de la CAD "coordination d’aides au déplacés".
Selon la coordination d’aides aux déplacés (CAD), une organisation locale basée à Oicha, plus de 3 800 ménages étaient recensés fin mai 2017 dans la commune rurale d’Oicha après plusieurs vagues de déplacements.
Désiré Kimoto souligne que parmi les déplacés recensés à Oicha, 400 ménages bantous et semi-bantous sont encore établis dans des écoles, plus de 200 ménages pygmées sont dans les sites de Mbimbi, Mabasele et Oicha 1er et plus de 3.000 ménages vivent difficilement dans des familles d’accueil à Oicha.
Le président chargé de la supervision de l’axe de Beni-Eringetti au sein de cette organisation, Mutimabisa Nzoghiera ajoute qu’environ 3.000 autres déplacés sont établis dans les agglomérations avoisinantes de Mavivi, Mbau, Mandumbi, Mamove et Mayi Moya.
La population locale témoigne que, depuis peu, on assiste à des interventions des humanitaires aussi bien dans le secteur médical et sanitaire tout en aidant à la scolarisation des déplacés. Quelques ONG internationales donnent de l'argent en liquide à certains ménages déplacés considérés plus vulnérables.
Mais pour le président des jeunes de Beni, Janvier Kasairo, il faut davantage sécuriser les villages de ces déplacés "pour améliorer la situation".
Ernest Muhero, de Oicha, en territoire de Beni au Nord-Kivu