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Le ministre des Finances lavé de tout soupçon de fraude en Afrique du sud


Un membre du groupe de manifestants proteste à l'extérieur du QG de l'ANC, à Johannesburg, le 5 septembre 2016.
Un membre du groupe de manifestants proteste à l'extérieur du QG de l'ANC, à Johannesburg, le 5 septembre 2016.

La justice sud-africaine a annoncé lundi l'abandon des poursuites très controversées pour fraude lancées contre le ministre des Finances Pravin Gordhan, qui ont révélé au grand jour les tensions agitant le gouvernement du président Jacob Zuma.

Après trois semaines de polémiques, le procureur général Shaun Abrahams a opéré un spectaculaire revirement en abandonnant toutes les accusations lancées contre M. Gordhan.

"J'ai ordonné le retrait des poursuites avec effet immédiat", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse.

Le patron du parquet avait annoncé le 11 octobre l'ouverture d'une enquête contre le ministre, soupçonné d'avoir favorisé les conditions du départ à la retraite d'un haut fonctionnaire en 2010 lors de son premier passage aux Finances (2009-2014).

Au terme de plus d'une heure d'un laborieux exposé M. Abrahams - toute honte bue - a reconnu que les accusations initialement retenues contre M. Gordhan et deux anciens responsables des services du fisc sud-africain (Sars) étaient infondées.

"Je suis convaincu que (M. Gordhan et ses deux coaccusés) n'ont pas eu l'intention d'agir contre la loi", a-t-il justifié.

Le ministre des Finances devait comparaître pour la première fois ce mercredi devant un tribunal de Pretoria.

L'annonce de son procès a provoqué un séisme politique qui s'est propagé jusqu'au sommet de l'Etat et inquiété les investisseurs et les marchés financiers, dans un pays à la croissance économique en berne et au fort taux de chômage.

Rejoint par l'opposition et de nombreux analystes, M. Gordhan avait jugé ces accusations sans fondements et dénoncé une manoeuvre politique du camp de M. Zuma, auquel il s'oppose sur la gestion des entreprises publiques et la lutte anticorruption.

Pressé de questions par les journalistes, M. Abrahams s'est efforcé lundi de nier toute interférence politique dans le dossier. "Cette affaire a été traitée comme les autres", a-t-il assuré.

M. Zuma avait lui-même nié toute pression sur la justice et même apporté son soutien à son ministre.

Le rand au plus haut

Mais l'affaire a fait éclater au grand jour de graves dissensions au sein du parti au pouvoir, le Congrès national africain (ANC), dont plusieurs poids lourds historiques ont apporté publiquement leur soutien au ministre.

Lundi, la classe politique sud-africaine s'est unanimement réjouie de la décision du parquet.

"L'ANC a toujours cru en l'innocence du camarade Pravin Gordhan", a-t-il rappelé dans un communiqué.

"Nous maintenons que Shaun Abrahams a lancé ces charges contre Pravin Gordhan pour des motifs politiques mesquins", a de son côté affirmé Mmusi Maimane, le chef de l'Alliance démocratique, le principal parti d'opposition.

M. Maimane a dénoncé une "embarrassante marche arrière" du parquet et exigé la "suspension avec effet immédiat" du procureur.

M. Abrahams a toutefois écarté cette éventualité. "Certainement pas !", a-t-il lancé.

"Vous avez quelqu'un à la tête du parquet qui est au mieux clairement incompétent et au pire manipulé politiquement", a asséné à l'AFP Judith February, chercheuse à l'Institut des études de sécurité (ISS) de Pretoria.

Ministre des Finances de 2009 à 2014, Pravin Gordhan, 67 ans, a été rappelé en urgence fin 2015 à son poste pour apaiser les marchés, inquiets de la décision du président de renvoyer deux titulaires du portefeuille en quatre jours.

L'abandon des poursuites a eu un effet immédiat sur la devise sud-africaine qui atteignait dans l'après-midi son plus haut depuis août 2015 face à l'euro à 14,81 rands et son meilleur niveau face au dollar depuis plus de deux mois à 13,54 rands.

Outre le dossier abandonnés lundi, M. Gordhan est également mis en cause pour avoir mis en place au sein du fisc sud-africain, qu'il a dirigé pendant dix ans jusqu'en 2009, une unité qui aurait espionné des hommes politiques, dont M. Zuma.

L'enquête, confiée au parquet général, est toujours en cours.

Elu en 2009, M. Zuma doit céder sa place à la tête de l'Etat à l'occasion des élections générales de 2019 mais son autorité est de plus en plus ouvertement contestée au sein de son parti.

Englué dans de nombreux scandales, le chef de l'Etat est notamment mis en cause pour ses liens sulfureux avec la famille d'hommes d'affaires Gupta.

Il a récemment obtenu l'interdiction de la publication d'un rapport potentiellement explosif de la médiatrice de la République sur ce sujet. Cette décision doit être évoquée mardi devant la justice.

Avec AFP

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