Après le Brexit au Royaume-Uni et la victoire de Donald Trump à la présidentielle américaine, tous les yeux étaient braqués sur la formation de Geert Wilders, dont le score était attendu comme un baromètre de la montée du populisme en Europe, à moins de 40 jours de la présidentielle française et avant les législatives allemandes de l'automne.
Selon des résultats temporaires compilés par l'agence de presse néerlandaise ANP, sur la base de 54,8% des voix, le VVD de Mark Rutte remporterait 32 sièges sur les 150 de la chambre basse du parlement néerlandais.
Une perte de 9 sièges certes par rapport aux dernières élections en 2012, mais une nette avance cependant sur le PVV de Wilders, qui n'aurait lui gagné que quatre sièges de députés, avec 19 élus.
Assurant qu'il s'agissait là d'un "succès", celui-ci s'est déjà positionné dans la nuit en vue des longues négociations qui commenceront dès ce jeudi, en se déclarant prêt à gouverner "si cela est possible", bien que l'ensemble des autres partis aient exclu une telle collaboration.
"Si cela ne marche pas, nous supporterons le gouvernement où cela est nécessaire, sur les questions qui nous sont chères", a-t-il ajouté.
Ces résultats ont provoqué un véritable soulagement à travers le vieux continent, le président François Hollande saluant ainsi "une nette victoire contre l'extrémisme". "Les valeurs d'ouverture, de respect de l'autre et de foi en l'avenir de l'Europe sont la seule véritable réponse aux pulsions nationalistes et de repli sur soi qui secouent le monde", a conclu M. Hollande.
Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a lui salué "un vote pour l'Europe, contre les extrémistes", alors que la chancelière allemande Angela Merkel, selon son porte-parole, s'est réjouie de "poursuivre une bonne collaboration en tant qu'amis, voisins, Européens".
'Politiciens raisonnables'
Célébrant sa victoire, le Premier ministre a lui assuré devant une salle bondée de La Haye qu'"après le Brexit et après les élections aux Etats-Unis, les Pays-Bas ont dit stop au populisme de mauvais aloi".
Au cours d'une campagne marquée par les questions d'identité, Mark Rutte, tout comme les leaders de certains autres partis, avait pourtant intégré quelques éléments auparavant réservés à son rival, invitant par exemple ceux qui ne respectent pas les valeurs néerlandaises à quitter ce pays de 17 millions d'habitants.
Dans son programme politique succinct, Geert Wilders promettait d'interdire l'accès des Pays-Bas aux immigrants musulmans, d'interdire la vente du Coran et de fermer les mosquées, dans un pays dont la population compte environ 5% de musulmans.
Crédité de 36 sièges il y a quelques mois, son Parti pour la liberté (PVV) était doucement retombé dans les sondages à l'approche des élections. Ce n'est pas la première fois que l'élu à la chevelure péroxydée, qui avait obtenu son meilleur résultat en 2010 avec 24 sièges, voit son score dégringoler entre les prédictions des sondages et le résultat du scrutin.
"Le PVV (de M. Wilders) n'est pas une force révolutionnaire version Trump", a commenté pour l'AFP Geerten Waling, chercheur en histoire politique à l'université de Leiden. "Et même si le résultat (du PVV) n'est pas minime, les gens sont globalement restés du côté des hommes politiques raisonnables".
Négociations
Les chrétiens-démocrates du CDA et les progressistes de D66 auraient aussi remporté 19 sièges chacun, tandis que les travaillistes du PvdA, partenaires de la coalition sortante, auraient eux enregistré une défaite historique, passant de 38 députés à 9 seulement.
Les écologistes de GroenLinks, menés par le jeune et charismatique Jesse Klaver, ont par contre quadruplé leur score avec 16 sièges de députés.
Le système électoral néerlandais à la proportionnelle presque intégrale oblige à créer des coalitions et dans un paysage aussi fragmenté la formation du prochain gouvernement pourrait prendre des mois. Le record actuel est de 208 jours.
Le CDA et D66 sont des partenaires naturels pour les libéraux, mais une telle coalition aurait besoin d'un parti supplémentaire pour obtenir la majorité de 76 sièges. Les regards se portent vers les chrétiens (CU, 6 sièges) et les protestants rigoristes du SGP (3 sièges), mais les écologistes pourraient également jouer un rôle important.
Le scrutin a été marqué par une participation massive: 81% des 12,9 millions d'électeurs se sont rendus aux urnes, selon l'Institut de sondage Ipsos. Aux dernières élections en 2010 et 2012, ces taux étaient de 74,6% et 75,3%.
Avec AFP