Echec de l'extrême droite à la présidentielle, remportée par un écologiste en Autriche

Le candidat écologiste, Alexander Van der Bellen à gauche, et Norbert Hofer, qui représente l'extrême-droite, lors d'un débat télévisé à Vienne, Autriche, le 1er décembre 2016.

L'extrême droite autrichienne a perdu dimanche son pari de concrétiser la poussée populiste en Europe en faisant élire son candidat à la présidence, Norbert Hofer étant devancé par l'écologiste Alexander Van der Bellen, selon les projections.

"Je suis infiniment triste que cela n'ait pas marché", s'est incliné M. Hofer dans un communiqué. "Je félicite Alexander Van der Bellen pour son succès et appelle tous les Autrichiens à rester solidaires et à travailler ensemble".

M. Van der Bellen, 72 ans, ancien doyen de la faculté d'économie de Vienne et ancien dirigeant des Verts, est crédité de 53,3% des voix, selon les premières projections, contre 46,7% à M. Hofer, 45 ans, vice-président du parlement et cadre du FPÖ depuis 25 ans.

Ce score marque une nette progression du candidat écologiste, qui n'avait obtenu que 50,3% des voix lors du scrutin initial le 22 mai. Ce résultat avait été annulé en raison d'irrégularités procédurales, à la suite d'un recours du FPÖ.

Cette fois-ci, le parti d'extrême droite a fait savoir qu'il ne contesterait pas les résultats.

Ce résultat marque un revers pour un camp populiste galvanisé par le Brexit en juin et la victoire de Donald Trump à la présidence américaine il y a un mois.

"Nous sommes tous très soulagés et très reconnaissants", a déclaré le directeur de campagne de M. Van der Bellen, Lothar Lockl. L'annonce de cette victoire a provoqué une explosion de joie des partisans du candidat, rassemblés au palais de la Hofburg à Vienne.

Le secrétaire général du FPÖ, Herbert Kickl, a reconnu la défaite de son parti dès les premières estimations connues.

En mai, les projections à l'issue du scrutin avaient donné les deux candidats au coude à coude. Il avait fallu attendre le décompte du vote par correspondance, le lundi, pour consacrer la victoire du candidat écologiste.

Ce vote est traditionnellement défavorable à l'extrême droite. Le résultat officiel ne sera proclamé que lundi.

Valeurs humanistes

Une élection de Norbert Hofer était attendue avec intérêt par les partis alliés du FPÖ au niveau européen, le Front national (FN) en France ou le parti pour la Liberté de Geert Wilders aux Pays-Bas, deux pays où se tiendront des élections nationales en 2017.

Dans un tweet en allemand, la députée FN Marion Maréchal-Le Pen avait adressé dimanche ses encouragement à M. Hofer, l'assurant du "soutien des patriotes du monde entier". "Beaucoup de succès, Norbert", avait de son côté tweeté M. Wilders.

M. Van der Bellen, un européen convaincu, avait souligné que le scrutin présidentiel allait montrer "la direction que veut prendre l'Autriche", si le pays souhaite continuer à être "un membre fidèle de l'Union européenne ou non".

M. Hofer n'avait pas plaidé ouvertement, au cours de la campagne, pour un "Öxit", une sortie de l'Autriche de l'UE mais il a de nouveau souligné dimanche vouloir faciliter un rapprochement entre les Etats-Unis de M. Trump et la Russie de Vladimir Poutine.

Evitant les dérapages ouvertement xénophobes qui ont longtemps été la marque de fabrique de son parti, fondé par d'ex-nazis en 1956, M. Hofer avait axé son discours sur la protection sociale, le pouvoir d'achat et la défense de l'emploi.

M. Van der Bellen avait de son côté insisté sur les valeurs humanistes de la République autrichienne et insisté sur l'importance des liens avec ses partenaires de l'UE, dont plus de 40% du PIB dépend des exportations.

La grande coalition entre sociaux-démocrates (SPÖ) et conservateurs (ÖVP) au pouvoir à Vienne depuis 2007, avait été éliminée dès le premier tour, le 24 avril. Plusieurs ténors de ces deux partis, dont le chancelier social-démocrate Christian Kern, avaient soutenu M. Van der Bellen, qui s'est présenté sous l'étiquette d'"indépendant".

Si l'Autriche affiche des indicateurs économiques à faire pâlir d'envie la plupart de ses voisins européens, une partie de la population se sent menacée par le déclassement, par la crise des réfugiés et par l'effet de l'élargissement de l'UE à ses voisins de l'Est.

Quel que soit le vainqueur, "il faudra que le nouveau président réconcilie le pays, cette élection, si longue, a tellement polarisé la société... et ce n'est d'ailleurs pas une spécificité autrichienne", a jugé dimanche une électrice viennoise, Katharina Gayer.

Avec AFP