Journée cruciale au Sénat américain sur la baisse de la fiscalité

Mitch McConnell, chef de file de la majorité républicaine au Sénat, Capitol Hill, Washington, le 30 novembre 2017.

La majorité républicaine du Sénat américain va tenter vendredi de surmonter d'ultimes différends pour adopter sans délai la grande baisse d'impôts promise par le président Donald Trump.

Alors que l'optimisme dominait jeudi, un accroc de dernière minute a forcé les chefs de la majorité à reporter à vendredi le gros des débats, ainsi que les votes sur les amendements les plus importants et sur l'adoption de l'ensemble du texte par la chambre haute du Congrès.

"Nous travaillons d'arrache-pied pour parvenir à 50 voix", a déclaré le sénateur du Texas Ted Cruz, sur Fox News.

Il y a 52 républicains sur 100 sièges, et la majorité n'a donc droit qu'à deux défections, tous les démocrates étant opposés.

La cause du problème de jeudi soir est la forme technique du mécanisme, réclamé par certains conservateurs, pour limiter la hausse des déficits publics dans la prochaine décennie. La façon dont un article était rédigé a été retoqué in extremis, forçant la majorité à revoir sa copie.

L'espoir est de parvenir à un compromis vendredi, ce qui donnerait Donald Trump une grande victoire politique. La Chambre des représentants a déjà adopté une version de la réforme fiscale le 16 novembre. Si le Sénat adopte la sienne, les deux chambres devront harmoniser leurs textes et revoter, avec un objectif fixé à la fin de l'année.

- 'Arnaque' -

La majorité républicaine est relativement soudée sur l'architecture de la réforme: une forte baisse d'impôts pour les entreprises et pour les particuliers, ainsi qu'une grande simplification fiscale qui permettrait aux Américains de remplir leur déclaration d'impôts sur une "carte postale", alors qu'aujourd'hui des millions de contribuables utilisent des logiciels payants ou des comptables pour remplir leurs feuilles d'impôts.

Le but affiché: soulager la classe moyenne et doper la croissance.

Jeudi matin, l'optimisme dominait. John McCain, l'un des trois sénateurs qui avait coulé l'abrogation de la loi santé de Barack Obama cet été, a annoncé qu'il voterait "oui", et plusieurs sénateurs promettaient que le vote final serait positif.

Mais certains conservateurs, menés par Bob Corker et Jeff Flake, s'inquiètent de voir leur parti fouler aux pieds l'orthodoxie budgétaire qu'il a longtemps prêchée lorsque Barack Obama occupait la Maison Blanche.

La réforme ajoutera en effet 1.000 milliards de dollars aux déficits publics sur la prochaine décennie, selon une nouvelle analyse publiée jeudi par le Joint Committee on Taxation.

Ces experts estiment que la baisse d'impôts coûtera 1.400 milliards de dollars aux comptes publics entre 2018 et 2027, qui seront partiellement compensés par environ 400 milliards de recettes fiscales générées par un regain de croissance du PIB estimé à 0,8 points par an en moyenne sur la décennie.

D'autres républicains transigent sur tel ou tel article: le taux d'imposition des sociétés en nom propre, les avantages fiscaux pour les familles avec enfants, ou encore la suppression, glissée dans le plan, de l'obligation de souscrire une assurance maladie qui est l'un des piliers de la loi santé de Barack Obama. Même le taux final de l'impôt sur les sociétés pourrait être de 21 ou 22%, au lieu des 20% réclamés par Donald Trump (actuellement, ce taux est de 35%).

Enfin, l'inclusion d'une mesure qui ouvrirait des terres protégées de l'Alaska aux forages pétroliers est contestée par de nombreux démocrates.

L'opposition démocrate, unie contre le projet, argumente de son côté que la réforme penche trop du côté des entreprises et des plus fortunés. Une analyse du Tax Policy Center montre que tous les niveaux de revenus gagneront en pouvoir d'achat, mais que les 5% de ménages les plus aisés profiteront relativement plus de la refonte fiscale.

"Au lieu de réformer la fiscalité pour aider vraiment la classe moyenne, Donald Trump et le parti républicain ont décidé de les arnaquer", a déclaré la sénatrice démocrate d'Hawaï Mazie Hirono.

Avec AFP