Le Sud-Coréen Moon à Washington sur fond de menaces nord-coréennes

Moon Jae-In, Séoul, Corée du Sud, le 24 juin 2017.

Le nouveau président sud-coréen, favorable au dialogue avec le Nord, se rend à Washington cette semaine pour discuter avec son homologue américain Donald Trump , avec pour toile de fond l'accélération par Pyongyang de ses programmes balistiques au mépris des sanctions.

En campagne électorale, Moon Jae-In, issu du centre-gauche, s'était dit disposé à aller à Pyongyang avant Washington, mais les Etats-Unis sont finalement sa première étape à l'étranger depuis sa prestation de serment le mois dernier.

Washington garantit la sécurité de la Corée du Sud. Quelque 28.000 soldats américains y sont déployés face à une Corée du Nord qui multiple les essais de missiles dans sa quête pour mettre au point un engin balistique intercontinental susceptible de porter le feu nucléaire sur le continent américain. Depuis l'entrée en fonctions de M. Moon, le Nord a testé pas moins de cinq missiles.

Aux yeux du chef du Pentagone Jim Mattis, le Nord est "la menace la plus urgente et la plus dangereuse". Et Donald Trump a fait de l'arrêt des programmes nord-coréens l'une de ses priorités.

Des questions se posent sur le déroulement du premier tête à tête entre un président plutôt de gauche et le milliardaire américain, qui milite pour un durcissement des sanctions et dont le gouvernement a dit que l'option militaire était sur la table. Ce qui mettrait Séoul en première ligne.

D'après les analystes, il est peu vraisemblable que cette première rencontre fasse des remous. Il s'agit de prendre la mesure de l'autre plutôt que d'étaler des divergences irréconciliables, jugent-ils.

La politique de Donald Trump -"pressions maximales et engagement"- permettrait de trouver des "dénominateurs communs" avec M. Moon, qui n'a jamais nié le besoin de sanctions tout en recherchant le dialogue, explique John Delury, professeur à l'Université de Yonsei.

"On peut éviter une collision frontale sur la politique envers la Corée du Nord", assure-t-il à l'AFP.

Le bouclier anti-missile américain devrait aussi figurer en bonne place des discussions.

Des éléments du système Thaad (Terminal High Altitude Area Defense) ont déjà été installés en Corée du Sud mais Séoul a gelé la poursuite du déploiement après une virulente campagne de la Chine qui a alterné représailles économiques et protestations diplomatiques.

Officiellement, ce gel s'explique par la nécessité d'une nouvelle enquête exhaustive sur l'impact environnemental du bouclier. Mais cette décision, qui enfonce un coin dans la politique de sécurité régionale de Washington, est d'après les analystes une façon pour M. Moon de jouer la montre et se sortir de l'imbroglio diplomatique reçu en héritage de l'ex-chef de l'Etat conservatrice destituée, Park Geun-Hye.

Outre ses commentaires de campagne, M. Moon en a agacé plus d'un en écrivant dans un récent livre que Séoul devait apprendre à dire "non" à Washington.

'Calmer les esprits'

Mais pour les analystes, le dirigeant sud-coréen, dont les parents étaient des réfugiés évacués du Nord par les forces américaines, s'efforcera à Washington de montrer que l'alliance bilatérale est intacte.

"M. Moon va chercher à calmer les esprits à Washington et donner l'impression qu'il n'y a pas de fissure entre les deux alliés", juge Hong Hyun-Ik, analyste à l'Institut Sejong.

Initialement, M. Moon "semblait être pris en étau entre la Chine et les Etats-Unis", ajoute-t-il. Mais le Sud-Coréen a été contraint de revenir "dans l'orbite américaine" sous la pression de ses opposants conservateurs.

M. Moon prône une approche en deux temps du problème nord-coréen. Tout d'abord, Pyongyang gèlerait ses essais nucléaires et de missiles balistiques à longue portée et en échange, Washington et Séoul réduiraient l'ampleur de leurs exercices militaires annuels conjoints.

Une seconde étape verrait le démantèlement total du programme nucléaire nord-coréen en contrepartie du rétablissement des relations diplomatiques et d'une aide économique.

Il s'agit d'une position comparable à celle de la Chine, le principal allié de Pyongyang, qui milite pour "une double suspension", des exercices conjoints et des essais nucléaires et balistiques nord-coréens, ce qu'a déjà rejeté Washington.

Cette approche est cependant compliquée par la mort la semaine dernière d'Otto Warmbier, étudiant américain rapatrié aux Etats-Unis dans le coma après sa détention en Corée du Nord.

Donald Trump a qualifié cette affaire de "scandale absolu", Pyongyang fustigeant en retour une "campagne de diffamation" américaine.

Avec AFP